Le 13 février 1997, Joseph Eugène Stiglitz prenait fonction comme économiste en chef de la Banque mondiale, adoubé du titre de premier vice-président de la puissante institution financière internationale. Dans son livre La grande désillusion (Plon, 2002), l’économiste américain raconte son premier jour de service : « Ce qui a retenu mon regard dès mon entrée dans les vastes locaux splendides et modernes de son siège central, 19e rue à Washington, c’est sa devise : “Notre rêve : un monde sans pauvreté.” Dans une sorte d’atrium de treize étages se dresse une statue : un jeune garçon conduisant un vieillard aveugle. Elle commémore l’éradication de l’onchocercose. (…) De l’autre côté de la rue se dresse un autre monument splendide élevé à la richesse publique : le siège du Fonds monétaire international. À l’intérieur, l’atrium de marbre, qu’agrémente une flore luxuriante, rappelle aux ministres des finances en visite qu’ils sont au centre de la fortune et du pouvoir. »
Au-delà de la féerie des
lieux, un détail m’a particulièrement interpellé dans le récit du prix Nobel
d’économie : la statue en bronze. Pour un esprit insistant et persistant, comme
le mien, l’évocation de cet objet insolite m’a renvoyé à un autre symbole,
celui d’une Afrique, « aveugle, sourde et muette », craintive et plaintive,
tenue par la canne de la sénilité et de la servilité et guidée par l’aumônier
international dans les dédales d’une mondialisation féroce et véloce.
L’allusion aurait assurément prêté à confusion, n’eût été la cruauté d’une réalité
dramatique qui traduit le quotidien de plus d’un milliard quatre cents millions
de personnes sur le continent. Après six décennies d’indépendance, à mille
lieues de la prospérité mondiale, chaque 10 secondes un enfant africain
meurt de faim, chaque 10 minutes 15 Africains sont tués par le sida, chaque 10
heures 450 Africains décèdent de paludisme et pourtant… 246 millions de dollars
(environ 155 milliards de francs CFA) sortent, chaque jour, frauduleusement
du continent africain pour être transférés et placés dans des pays qui ont
déjà bouclé leur cycle de développement.
Un crève-cœur
L’Afrique est devenue un
crève-cœur. La misère, la famine, les épidémies, l’insécurité, et depuis peu la
Covid-19 sont devenues des produits d’appel pour certains dirigeants africains
qui n’hésitent pas à arpenter, avec amis, femmes et enfants, les grandes allées
mondaines des villes aux mille et une lumières ; à se pavaner dans les palaces
et hôtels de luxe ; à faire du shopping dans les avenues chic et choc ; à
apprécier le thé savoureux, le café langoureux et les liqueurs généreux dans
les salons feutrés des palais et des palaces ; pour au final participer aux
sommets, forums, conférences, tables rondes avec, sur le cartable bien en
évidence, «Notre pays est très pauvre et très endetté», et sur la gibecière
fluorescente, «Aidez-nous svp, 5 francs n’est pas peu, 5 000 francs n’est pas
trop !» Et la communauté internationale contribue largement – si elle n’en est
pas l’initiatrice – à la perpétuation de ce système immoral et amoral, à
travers la création de multitudes d’instruments financiers, de projets et de
programmes. Le budget de fonctionnement de beaucoup de ces projets et ONG (coût
des expatriés et des prestataires, achat et entretien de véhicules,
déplacements et missions, etc.) dépasse largement l’apport réel aux populations
censées être les bénéficiaires de l’aide, et dont certains des responsables se
payent même le luxe de détourner une bonne partie du peu qui reste dans
l’assiette.
L’aide internationale
n’est jamais neutre. Il faudrait bien être naïf pour penser que le monde est
aseptisé. Il ne l’a jamais été et il ne le sera jamais. Pas plus il ne pourrait
être un refuge de bisounours et de câlinours, encore moins un sanctuaire
pour les esprits faibles et les âmes sensibles. Les images exceptionnelles d’une
rare féerie, remarquablement mises en scène et diffusées à profusion sur la
Toile, de prédateur portant secours à sa proie, l’émancipant de sa propre prédation
et de celle des autres, font partie des multiples exercices de manipulation destinés
à faire accroire que le moustique pourrait faire usage d’insecticide pour
assainir sa riveraineté. L’économiste Demba Moussa Dembélé dans une tribune récente
publiée par Financial Afrik rappelait : « L’Afrique est la seule
région au monde où l’on fait croire aux populations que leur sort dépend de la
mendicité internationale, appelée «aide au développement». Mais en réalité,
celle-ci est avant tout un instrument de politique étrangère des pays
«donateurs».
En avril 2020, dans le
cadre des mesures d’allégement de la dette en lien avec la crise sanitaire, la
directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina
Georgieva, avait fait une déclaration surprenante : « Nos pays membres les plus
pauvres et les plus vulnérables recevront ainsi des dons qui couvriront leurs
obligations envers le FMI pour une phase initiale de six mois, ce qui leur
permettra de consacrer une plus grande partie de leurs faibles ressources
financières aux soins médicaux et autres efforts de secours d’urgence vitale. »
Vous avez bien lu ! Le FMI se paye sur la bête en octroyant des « dons » aux
pays pauvres d’Afrique pour que ceux-ci puissent s’acquitter de leurs dettes
vis-à-vis de l’institution internationale. Quelle trouvaille géniale ! Tout est
mis en œuvre pour que la machine de la dépendance se perpétue et se renforce.
Le chantage à l’aide
« L’Afrique se retrouve
dans une situation inextricable. Il faut faire attention à ce qu’on dit, sinon
on n’obtient pas telle aide ou telle assistance. C’est quoi, ce chantage ? Cela
me fait de la peine d’être assis là et de devoir admettre une telle chose
devant vous. Mais voilà la vérité brute. » Ainsi s’exprimait à l’époque le bouillant
président ghanéen Jerry Rawlings face à la presse étrangère. Ce point de vue
semble être partagé par le président sud-africain. Lors de l’inauguration de la
NDB (New Development Bank), en juillet 2014, Jacob Gedleyihlekisa Zuma a
déclaré que « l’aide occidentale à l’Afrique vient avec des restrictions, des
conditions pour nous maintenir dépendants ».
Lors d’une conférence de
presse donnée le 4 décembre 2019, à l’issue d’un sommet de l’Organisation du
traité de l'Atlantique Nord (OTAN) à Watford, près de Londres, Emmanuel Macron
avait tenu des propos fermes pour le moins surprenants à l’adresse des
dirigeants du G5 Sahel : « J’attends d’eux qu’ils clarifient et formalisent
leurs demandes à l’égard de la France et de la communauté internationale.
Souhaitent-ils notre présence et ont-ils besoin de nous ? Je veux des réponses
claires et assumées sur ces questions. » Visiblement agacé par la montée du
sentiment anti-français sur le continent africain, le président français a
ajouté : « Je ne peux ni ne veux avoir des soldats français sur quelque sol du
Sahel que ce soit à l’heure même que l’ambiguïté persiste à l’égard de
mouvements antifrançais, parfois portée par des responsables politiques. » «
C’est la raison pour laquelle j’ai invité à Pau (…) les cinq chefs d’État africains
impliqués dans le G5 Sahel, pour pouvoir apporter des réponses précises sur ces
points ; leurs réponses sont aujourd’hui une condition nécessaire à notre
maintien », a-t-il poursuivi. L’invitation qui était destinée à des fins de
clarification entre « partenaires » a vite pris l’allure d’une convocation. Le
président burkinabé d’alors Roch Marc Christian Kaboré n’a pas caché son
courroux devant cette façon de faire peu élégante de son homologue français : «
Le partenariat doit être respectueux des uns et des autres et je crois que cela
est très important, a-t-il affirmé. J’estime que le ton et les termes utilisés
avant l’invitation posent des problèmes, parce que ça, c’est le contenu des
débats qu’on doit avoir ensemble. »
Ce n’est pas la première
fois et, certainement, pas la dernière fois que l’Afrique serve de «paillasson»
– pour emprunter l’expression de Rama Yade – sur lequel les dirigeants
économiques et politiques du monde entier viennent s’essuyer les pieds de la
salissure de leurs forfaits. Sinon, dans quel contexte peut-on situer les
propos licencieux de l’ancien président américain Donald Trump, qui ne s’était
point gêné pour qualifier certains États africains de « pays de merde » («
shithole countries ») ? Le dirigeant américain pouvait-il qualifier la Corée du
Sud, l’Indonésie, la Malaisie, les Philippines, Singapour ou la Thaïlande,
encore moins la Corée du Nord, de « pays de merde » ? Assurément, non.
Pourtant, au début des années soixante, presque tous ces pays étaient aussi
pauvres que la majorité des États africains. Qu’ont-ils fait pour accéder au
statut respectable et respecté de « Nouveaux pays industrialisés (NPI) » alors
que la majorité des pays africains continuent à pointer, sans discontinuité,
sur la liste peu enviable des pays les plus pauvres de la planète ? Au-delà des
protestations, des indignations et même des récriminations de l’opinion
publique africaine, n’y a-t-il pas mieux à faire pour répondre à ces
grivoiseries répétées, notamment par la capacité et l’intelligence des
Africains à changer fondamentalement et définitivement le visage de leur
continent, de zones de conflits et de pauvreté en havres de paix et de
prospérité partagée ?
Il y a quelques années,
en décembre 2017, le Conseil d’administration du FMI avait appelé « les
autorités nationales des pays de la CEMAC à tenir pleinement leurs engagements
d’opérer résolument un assainissement des finances publiques afin de rétablir
la viabilité extérieure de chaque pays membre ». Il s’était félicité de «
l’engagement de la BEAC à envisager un nouveau durcissement de la politique
monétaire si l’accumulation des réserves n’atteint pas les objectifs de la
BEAC. » L’ultimatum donné aux autorités politiques et monétaires de la CEMAC
était clair : programmes d’ajustement structurel drastiques sous l’égide du FMI
ou dévaluation du franc CFA. Les pays membres de la CEMAC, fragilisés et
efflanqués, avaient choisi la cure d’austérité avec une réduction drastique du
train de vie de l’État assortie de coupes sombres dans les dépenses sociales et
de l’arrêt de plusieurs projets d’infrastructures. Interrogé sur l’antenne de
RFI à l’issue de la réunion biannuelle de la zone franc CFA tenue le 13 avril
2018 à Brazzaville, le ministre français de l’Économie et des Finances Bruno Le
Maire ne s’était pas privé d’admonester les dirigeants de certains pays
d’Afrique centrale : « Il faut que, dans la zone CEMAC, il y ait des programmes
FMI et que les États qui n’ont pas de programme FMI en aient un le plus
rapidement possible. […] Il doit y avoir entre la République du Congo, le FMI
et les différents États partenaires de la République du Congo, une transparence
totale. Je dis bien totale. Rien n’est possible sur la confusion ou sur la
dissimulation. […] Sans transparence, il n’y a pas de confiance. Et sans
confiance, il ne peut pas y avoir d’aide, ni de la part du FMI ni de la part
des autres États. […] Nous attendons des gestes concrets en termes législatifs
sur la lutte contre la corruption dans la République du Congo. Nous avons
besoin de gestes concrets. »
En vertu de quel statut
et au nom de quel programme, le FMI peut-il se montrer « intransigeant »
vis-à-vis d’un pays souverain fût-il pauvre et africain ? À l’époque, ne
pouvant accéder à la hauteur de la directrice générale du FMI, pour lui poser
cette question, nous nous sommes contenté, en guise de réponse, de son propos
rapporté par le journal Le Monde du 10 avril 2018 : « Si le FMI prête de
l’argent de la communauté internationale, il est redevable de cette
transparence. »
Quant à la France, au nom
de quel « droit seigneurial » se montre-t-elle incisive et directive vis-à-vis
des États africains dits indépendants ? Doit-on plaindre l’excessivité du
propos du grand argentier français et des dirigeants du FMI ? Ou doit-on s’en
accommoder du fait que c’est devenu tellement fréquent, et donc banal, que cela
ne choque plus personne, pas en tout cas les dirigeants des pays africains mis
en cause ? Si oui, peut-on imaginer un seul instant la réaction de ces derniers
si de tels propos étaient tenus par leur presse locale, l’opposition politique
ou la société civile de leurs pays ? Bon, comme ça vient « d’en haut d’en haut
», entendez par là du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale, de
l’Union européenne, des États-Unis ou de la France, alors ce n’est pas bien
grave et on se plie, même en deux, à titre de révérence et de convenance.
Les questions irritantes,
et bien d’autres, les Africains continuent à se les poser. Point de méprise !
Nul besoin d’être financier, créancier ou même aumônier pour proscrire
l’opacité des comptes publics, la dissimulation de dettes et la dissymétrie de
l’information. Il est vain de vouloir cacher un éléphant coincé dans un couloir
en verre. Mais de là à admonester un pays souverain, il y a un pas à ne pas franchir.
Mais comme le dirait l’autre, on n’a que ce qu’on mérite.
Tenez, le siège de
l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba, haut lieu des rencontres des dirigeants
africains, est devenu depuis le 28 janvier 2012 la cocarde de la puissance de
la Chine sur le continent. Mais aussi et surtout le symbole d’une Afrique
mendiante et dépendante. Avec la rondelette somme de 200 millions de dollars US
(154 millions d’euros), l’empire du Milieu a offert à l’UA clé en main
(jusqu’aux équipements et mobiliers) l’imposant bâtiment de verre et d’acier de
trente étages construit, en moins de deux ans et demi, sur les ruines d’une
ancienne prison de la capitale éthiopienne. À l’entrée de l’édifice, bien en
exergue et pour l’éternité, on peut lire sur une pierre gravée « Avec l'aide du
gouvernement de la République populaire de Chine. » En reconnaissance, le 18e
sommet de l'UA qui s’est tenu le lendemain de l’inauguration de son nouveau
siège a adopté une motion de « remerciement et de gratitude » envers le
généreux bienfaiteur chinois.
Cinq années plus tard,
coup de tonnerre ! Le journal français Le Monde révèle dans une enquête publiée
le 26 janvier 2018 que le siège de l’Union africaine serait espionné par la
Chine. En voici un extrait de cette rocambolesque affaire : « En janvier 2017,
la petite cellule informatique de l’UA a découvert que ses serveurs étaient
étrangement saturés entre minuit et 2 heures du matin. Les bureaux étaient
vides, l’activité en sommeil, mais les transferts de données atteignaient des
sommets. Un informaticien zélé s’est donc penché sur cette anomalie et s’est
rendu compte que les données internes de l’UA étaient massivement détournées.
Chaque nuit, les secrets de cette institution, selon plusieurs sources
internes, se sont retrouvés stockés à plus de 8 000 km d’Addis-Abeba, sur de
mystérieux serveurs hébergés quelque part à Shanghai, la mégapole chinoise. (…)
Quatre spécialistes venus d’Algérie, l’un des plus gros contributeurs
financiers de l’institution, et des experts en cybersécurité éthiopiens ont
inspecté les salles et débusqué des micros placés sous les bureaux et dans les
murs. (…) “Ça arrange tout le monde que ce soit une passoire, déplore un
fonctionnaire déjà présent du temps de l’Organisation de l’Unité africaine
(OUA, 1963-2002). On se laisse écouter et on ne dit rien. Les Chinois sont là
vingt-sept heures sur vingt-quatre, ont planté plein de micros et d’outils
d’espionnage cyber quand ils ont construit cet immeuble. Et ils ne sont pas les
seuls !” Selon les documents extraits par Le Monde, en collaboration avec le
site The Intercept, des archives de l’ex-consultant de l’Agence nationale de
sécurité (NSA) américaine Edward Snowden, les antennes des services secrets
britanniques (GCHQ) n’ont pas épargné l’UA. Entre 2009 et 2010, plusieurs
responsables ont ainsi vu leurs appels et leurs courriels interceptés (…). »
L'ambassadeur de Chine auprès de l’UA a récusé totalement l’accusation du
journal français en des termes incisifs : « Je pense qu'il s'agit d'une
histoire sensationnelle, mais elle est aussi complètement fausse et une
absurdité. »
Vrai ou faux ? Qu’importe !
C’est la surprise manifestée par certains dirigeants africains qui est
renversante. Comment peut-on aimer une rose sans épine ? Le regretté professeur
Joseph Ki-Zerbo rappelait qu’on ne peut pas dormir indéfiniment sur la natte
des autres et bien s’en porter. Dans ces conditions, tôt ou tard, on finira par
voir des comportements désobligeants ou entendre des propos blessants de nos
généreux bienfaiteurs.
Les limites de l’aide
L’Afrique ne peut pas
continuer à tendre la main ad vitam aeternam. La majorité des économistes sont
d’avis qu’aucun plan de développement crédible ne peut être impulsé de
l’extérieur, encore moins reposer sur le financement des capitaux étrangers,
sauf à secréter l’assistanat, la pauvreté et la dépendance du pays concerné. En
vérité, de tout temps et en tous lieux, l’aide étrangère a toujours montré ses
limites. Elle est imprévisible et variable. Elle n’a jamais développé un pays.
D’ailleurs, si elle le pouvait, ça se saurait. Au contraire, elle crée une
accoutumance poussant son bénéficiaire à la génuflexion éternelle. Et Haïti, le
premier pays noir indépendant dans le monde aurait été la forme la plus aboutie
de ce modèle. Ce pays a bénéficié de l’équivalent de 120 plans Marshall en
trois décennies sans jamais réussir à s’extirper de la grande pauvreté ! Bien
au contraire, le niveau de vie des Haïtiens a décru de 20 % entre 1960 et 2007. De l’aveu de
l’ancien Premier ministre haïtien, Michèle Pierre-Louis, de passage à Montréal
le 9 mai 2012, « les effets de l’aide internationale en Haïti ne sont visibles
qu’au microscope ». Selon une étude Développement endogène et limites de l’aide
internationale en Haïti, menée par Stéphane Pallage et Nicolas Lemay-Hébert,
Haïti a bénéficié au titre de l’aide internationale au développement d’un
transfert moyen de 8,2 % de son PIB durant la période 1965-1995. Les auteurs
concluent que « l’aide internationale n’implique pas le développement
économique. Elle n’en est ni une condition nécessaire ni une condition
suffisante. Elle peut même constituer une entrave importante à ce développement
». D’après le Center for Economic and Policy Research (CEPR), sur un apport de
fonds total de l’USAID de 1,38 milliard de dollars destiné à la reconstruction
de Haïti, « à peine 0,9 % est parvenu aux mains d’organisations haïtiennes,
alors que 56,6 % sont allés à des firmes basées à l’intérieur du Beltway
(Washington, Virginie et Maryland). »
Le ministre kenyan de la
Planification et du Développement national, Anyang Nyongo, a noté que dans
certains cas, l'ONU et d'autres organisations internationales envoient des
experts en Afrique pour chercher une information qui est déjà disponible sur
Internet. Il a tenu ces propos le 11 juillet 2005 dans une déclaration faite
devant le forum du Conseil économique et social de l'ONU à New York. Il a
estimé que « le parachutage d'experts » depuis le siège des Nations unies était
une forme d'assistance technique source de gaspillage des ressources, tout en
aggravant le sous-développement dans les pays pauvres. Il a dit que le
renforcement des capacités intellectuelles était souvent altéré par la
surdépendance « aux experts parachutés » dans les pays en développement.
Le directeur adjoint du
département Afrique au FMI, Roger Nord, s’exprimant à la tribune de l’OCDE en
octobre 2015, déclarait : « L’histoire économique nous a appris que le
développement économique repose finalement sur la création et le développement
des sources intérieures de financement. » Deux mois plus tard, son représentant
au Mali, Anton Op de Beke, reprenait, presque mot pour mot, le même constat : «
L’histoire économique nous a appris que le développement d’un pays repose
finalement sur la mobilisation des ressources financières à l’intérieur. » Et
les deux fonctionnaires internationaux ont raison de stigmatiser les limites de
l’aide étrangère, même s’ils semblent, malheureusement, privilégier la
fiscalité comme principal levier de mobilisation des ressources internes.
Nous ne dénigrons pas
tout. Tout n’est certainement pas noir dans l’aide étrangère. Par-ci par-là, il
y a quelques réussites sur le continent africain en lien avec la générosité
internationale et avec la bonne utilisation qui en est faite par les dirigeants
locaux. Mais, admettons-le, il y a aussi de la malice et de la ruse de la part
de certains « bienfaiteurs » qui n’hésitent pas à dissimuler, à travers l’appât
de l’assistance technique, des subventions, des dons, des cadeaux et autres
aides, l’hameçon destiné à attraper les pays africains et à les maintenir dans
les liens de la dépendance. Comme le dirait l’autre, c’est comme si « on
vous coupe les bras et à l’heure du repas on vous dit de ne pas vous en faire
qu’on portera la cuillère à votre bouche. » Il faut donc détricoter et
déconstruire les modèles de « développement » actuels, qui ont largement montré
leurs limites d’une part, et revisiter les partenariats bilatéraux et
multilatéraux d’autre part. Pour l'ancien directeur général de l'Organisation
mondiale du commerce (OMC) Pascal Lamy, « il faut sortir de l'approche d'aide
au développement européenne qui a longtemps consisté à apprendre aux Africains
à faire comme nous. Un vrai partenariat repose sur le principe que nous
partageons les mêmes défis globaux en termes d'unification, de sécurité, de
transition technologique, de démographie, d'environnement et que nous cherchons
ensemble les bonnes solutions. »
Pour le regretté écrivain
et homme politique malien Seydou Badian Kouyaté, « l’aide au développement est ridicule
et ceux qui l’acceptent sont ridicules ». L’écrivaine sénégalaise Fatou Diome
renchérit : « Celui à qui vous demandez la charité, vous ne pouvez pas le
tutoyer. Celui à qui vous demandez la charité, vous ne pouvez pas lui imposer
des règles. Celui à qui vous demandez la charité, vous baissez la tête devant
lui. Et quand nos dirigeants baissent la tête, les peuples se mettent à genoux.
»
Oui, il faut arrêter
l’aide…
L’aide à l’Afrique est
devenue un tonneau des Danaïdes. C’est une chausse-trappe. L’ancien diplomate
français Laurent Bigot, chroniqueur pour Le Monde Afrique, livre son analyse
sans concession : « L’aide publique au développement est d’abord un business
qui fait vivre des dizaines de milliers de fonctionnaires internationaux et
nationaux, mais aussi une myriade de consultants. Ils ont tous en commun un
objectif : ne pas scier la branche sur laquelle ils sont assis et sur laquelle
ils vivent grassement. J’ai toujours été fasciné par l’irresponsabilité que
génère l’argent de l’aide publique au développement. C’est l’argent de
personne. Tout le monde se comporte comme si c’était de l’argent créé ex
nihilo. Les bailleurs sortent pourtant ces sommes de la poche de leurs
contribuables, mais n’ont aucune exigence sur l’utilisation. Les bénéficiaires
n’ont guère plus de considération pour ces sommes (parfois folles) qui tombent
dans leur escarcelle sans grand effort (on se demande d’ailleurs s’il n’y a pas
une prime au mauvais élève…). » Le consultant français poursuit : « L’Afrique
ne mérite-t-elle pas un objectif plus ambitieux, à savoir la fin de l’aide ?
N’est-ce pas la vocation de l’aide publique au développement que de s’arrêter,
signe qu’elle aura atteint ses objectifs ? Il est temps qu’une grande
conférence internationale fixe le terme de l’aide, adressant au monde un
message clair : l’Afrique peut soutenir son propre développement sans être
assistée. Pour cela, il faudra changer les mentalités et ce ne sera pas une
mince affaire. »
L’économiste français
Thomas Piketty n’y va pas de main morte pour apostropher les pratiques peu
orthodoxes des puissances occidentales en Afrique : « Plutôt que
de se donner bonne conscience avec une aide qui revient souvent à payer à prix
d’or des consultants étrangers, l’Union européenne devrait obliger ses multinationales
à publier de façon la plus claire les bénéfices réalisés et les impôts payés. »
À l’appui de sa thèse, le célèbre économiste français précise : « Nous
savons que les bénéfices et les revenus rapatriés par les entreprises étrangères
atteignent entre 5 % et 10 % du PIB des pays, ce qui est considérable. Et
encore ne s’agit-il ici que des flux licites qui ne comptabilisent pas tout
l’argent qui s’évade vers des paradis fiscaux. C’est en tout cas bien plus que l’aide
publique au développement. Il y a de l’hypocrisie derrière le discours qui est
tenu aux Africains sur la modernisation et la lutte contre la corruption. Ce
sont souvent les entreprises européennes qui bénéficient de régimes fiscaux peu
transparents. »
Alors, doit-on
accepter la perpétuation d’un modèle économique et social, bancal et létal, proposé
ou imposé – qu’importe d’ailleurs lequel des deux – qui a confisqué le passé du
continent, qui intoxique son présent et qui hypothèque dangereusement son avenir ?
Comment certains pays africains sont-ils arrivés à tout privatiser, à tout sous-traiter,
à tout externaliser, leur sécurité, leur santé, leur économie, leur système
bancaire, leur monnaie, leur espace aérien, leur télécommunication, et même (s’il
vous plaît) la collecte et le ramassage de leurs ordures ?
Le jour où l’élite
politique africaine comprendra que la solution à la lancinante question du développement
de leurs pays n’est pas à Paris, ni à Washington, ni à Pékin, ni ailleurs, elle
aurait fait un grand pas sur le chemin de la lucidité. Que l’on soit donc
clair, il ne peut pas y avoir de développement, encore moins de prospérité pour
les populations africaines, en confiant les économies de leurs pays aux
partenaires bilatéraux et aux institutions multilatérales, avec l’espoir qu’ils
sauront faire preuve de mansuétude à leur égard. Et même à rêver que ces pays «frères
et amis» ralentiraient leurs économies pour que les nôtres puissent décoller.
Franchement, où a-t-on vu un prédateur affranchir sa proie et la hisser à sa
hauteur ? Le très alerte spécialiste en intelligence économique Guy Gweth aurait
prévenu : « Aucun État au monde ne peut vous aider à vous battre contre lui. »
Derechef, que les
dirigeants africains se posent une simple question de bon sens : Pourquoi les
autres pays, ceux qu’ils s’empressent de visiter, empruntent le chemin inverse
en se bousculant pour faire leurs emplettes en Afrique, qui de quoi faire
tourner leurs usines, qui de quoi préserver l’emploi de leurs concitoyens, qui
de quoi nourrir leurs populations, qui de quoi asseoir leur hégémonie, qui de
quoi soigner leur stature, et tutti et quanti ? Les sages bambaras disent : «
Quand tu vois la langue circuler entre les doigts, si elle ne cherche pas le
sel, elle cherche l’huile. »
Il est répété à satiété,
comme une litanie psalmodiée, que l’Afrique est la nouvelle frontière de la
croissance économique mondiale, ou que l’Afrique est l’avenir du monde, ou même
que l’Afrique est le XXIe siècle... Et les Africains y croient, prêts à ingérer
tout ce qui se conçoit et se fait ailleurs, même de mauvais ; et, vent debout,
à refuser et à récuser tout ce qui se dit et se fait chez eux, même de bon.
Dans un livre à succès L’aide
fatale : Les ravages d’une aide inutile et de nouvelles solutions pour
l’Afrique (Jean-Claude Lattès, 2009), l’économiste zambienne Dambisa Moyo,
ancienne consultante de la Banque mondiale, n’y va pas par quatre chemins pour
fustiger la forte dépendance du continent africain : « L’aide est une drogue
pour l’Afrique. Depuis soixante ans, on la lui administre. Comme tout drogué,
elle a besoin de prendre régulièrement sa dose et trouve difficile, sinon
impossible, d’imaginer l’existence dans un monde où l’aide n’a plus sa place.
Avec l’Afrique, l’Occident a trouvé le client idéal dont rêve tout dealer. »
L’Afrique ne veut pas
être aimée ; elle veut être respectée. Elle n’a pas besoin de charité ;
elle souhaite la parité : coopérer et échanger d’égal à égal. Est-ce si
difficile à comprendre ? L’Afrique a plus besoin de partenaires que de
donateurs, d’intérêts convergents que d’intérêts imposés, de prêts libres que
de dons liés, de relations durables que de générosité vénérable. Les partenaires
et les sources de financement doivent être diversifiés, en mettant en œuvre des
solutions innovantes, audacieuses et vigoureuses de mobilisation de ressources
endogènes.
…et stopper la fuite des
capitaux
Déjà en 2015, le Groupe
de haut niveau chargé de la question des flux financiers illicites (FFI) dirigé
par l’ancien président sud-africain Thabo Mbeki alertait les dirigeants du
continent sur l’ampleur du phénomène des FFI. En effet, il était arrivé à la
conclusion que l’Afrique perd chaque année la somme colossale de 50 milliards
de dollars, et qu’elle sera siphonnée de la somme colossale qu’elle a perdue
durant cinquante années, plus de 1 000 milliards de dollars du fait des flux
financiers illicites. Selon les auteurs du Rapport Thabo Mbeki, présenté et
adopté lors du 24e sommet de l’Union africaine tenu les 30 et 31 janvier 2015 à
Addis-Abeba, l’Afrique a perdu, durant ces cinquante dernières années, plus de
1 000 milliards de dollars du fait des flux financiers illicites. Et le
phénomène a crû de 20,2 % par an durant la période 2002-2011, selon
l’Association Global Financial Integrity. Le Rapport dénonce « la menace que
représentent les FFI pour le développement inclusif de l’Afrique » et appelle à
« une action politique urgente pour vaincre le phénomène ». Pour Thabo Mbeki,
président du Groupe de haut niveau, « l’un des moyens importants de trouver les
ressources qui permettront de financer le programme de développement pour
l’après-2015 consiste à retenir en Afrique les capitaux qui sont produits sur
le continent et qui doivent donc légitimement rester en Afrique ». Le
développement de ces activités financières illicites a des conséquences graves
sur l’économie nationale.
Nécessaire sursaut
Comment l’Afrique est-elle devenue un « déversoir de produits »,
un « receveur universel » et un « carrefour alimentaire » – pour emprunter des formules malheureuses – à
tout consommer et à peu produire, à acheter de la
camelote, des friperies de l’Europe aux pacotilles de l’Asie,
en passant par les vieilleries de toutes sortes, celles
que les autres rejettent quand ils n’en ont plus envie, allant des véhicules
âgés aux congélateurs usagés, en passant par les chaussures abîmées, la
vaisselle décatie, les jouets d’enfant élimés, les serviettes usées, les vieux
matelas d’hôpitaux souillés, les draps flétris, les soutiens-gorges défraîchis,
et même les caleçons et pyjamas avachis ?
Comment peut-on continuer en Afrique à bomber le torse, la sueur sur le
front et « les yeux dans les yeux » (pour reprendre une expression malmenée
et laminée dans le landerneau politique français) lorsque la majorité de leurs
programmes socio-économiques sont financés par l’extérieur avec l’entregent
manifeste du FMI ? À la suite de cette dépendance économique, quelle
indépendance politique lorsqu’une
bonne partie du budget de nos élections est à la charge des « partenaires »
techniques et financiers ? Et comment peut-on après s’insurger contre
l’ingérence extérieure ?
En un mot comme en
mille, comment les Africains sont-ils devenus des mendiants sur leurs propres
terres et à être soumis à l’ordalie, cette forme de supplice médiéval qui
reposait sur le postulat que l’innocence ou la culpabilité de l’accusé était
basée sur sa capacité à surmonter une épreuve mortelle ?
Chers dirigeants africains,
la main qui donne est toujours au-dessus de celle qui reçoit. Cet aphorisme ne
relève pas seulement de la morale ou du domaine religieux. C’est une constante
des réalités géopolitiques et géostratégiques. Le monde s’est toujours révélé
une affaire de rapport de forces. Comme dans la jungle, chacun dîne d’un plus
petit que soi. Ceux qui, par chance ou par malchance, ne finissent pas leur
course dans la panse des prédateurs sont secourus par l’ambulance des aumôniers
internationaux. Juste de quoi leur remettre sur pied en attendant la prochaine
chasse. « Dès lors, les dirigeants africains devraient comprendre que ni
la Banque mondiale ni le FMI ne les aideront à se développer. Leur rôle est de
les garder dans l’orbite occidentale », estime l’économiste Demba Moussa
Dembélé.
Tous, même les
diplomates au langage plus doucereux que sulfureux s’accordent à dire que
les États n’ont pas d’amis mais des intérêts à conquérir et à défendre.
Et tous les moyens sont mis en œuvre pour y parvenir. Les « généreux »
donateurs ont toujours dans leur « boîte à outils » de quoi serrer un
peu plus la vis. D’ailleurs, dans un document présumé être la « Charte de
l’impérialisme », circulant à profusion sur le Net, il est indiqué : «
Notre aide doit être accompagnée des recommandations fortes de nature à
empêcher et briser toute action de développement des pays du tiers-monde. »
Assis sur des réserves
immenses de minerais, les pieds dans l’eau, avec « une bouche qui dégage une
haleine de pétrole » (l’expression est empruntée au politologue Babacar Justin
Ndiaye), les Africains continuent à tendre la sébile pour obtenir l’obole.
Leurs gamelles ont fait plusieurs fois le tour du monde. Pourtant, malgré cette
débauche exceptionnelle d’énergie, les Africains continuent de vivre dans une
précarité insoutenable ; leur continent tient fermement la corde de toutes les
formes possibles d’indigence. En plein XXIe siècle, des millions d’Africains
naissent et disparaissent dans une insupportable indifférence.
Chers dirigeants
africains, comme le dirait le chercheur et écrivain Sane Chirfi Alpha, on vous
fait couler des larmes de sang et vous les essuyez avec des épines ? De
grâce, faites en sorte que l’Afrique ne soit pas un champ de patates où tout ce
qui est utile se trouve sous terre. Le développement est un concept
profondément endogène. On ne peut pas le sous-traiter en le confiant aux bons
soins des « partenaires » au développement, aux institutions internationales et
aux « pays frères et amis ». Ce sera trop leur demander. Et même si c’est le
cas, ils ne le feront pas. Ce n’est pas parce qu’ils aiment le foie gras qu’ils
doivent forcément s’intéresser à la vie du canard. Les relations économiques
internationales sont comparables à un jeu à somme nulle. Dans ce contexte de
compétition mondiale, chaque État veille, légitimement et jalousement, sur ses
intérêts. Et tout y passe pour les préserver. Cela est d’autant plus logique
que dans la nature, rarement un dominant a hissé à sa stature un dominé pour
l’affranchir de sa domination. L’écrivain gallois Ken Follett le dit autrement
: « Dans le monde où nous vivons, il n’y a pas de pitié. Les canards avalent les
vers, les renards tuent les canards, les hommes abattent les renards et le
diable poursuit les hommes. » Que les dirigeants africains se le tiennent pour
dit !
Chers dirigeants africains,
le développement n’est pas une notion abstraite. Il se vit à l’intérieur et se
voit de l’extérieur, à des milliers de kilomètres à la ronde. On n’y accède que
par une vision longue et partagée, défrichée de toute contingence politique,
par organisation et méthode, par patriotisme et civisme, par labeur et rigueur.
Aussi, il ne sert à rien pour maintenir les programmes insanes avec le FMI, de
continuer à embellir l’état de vos économies par des indicateurs
macroéconomiques supposés « solides et performants », à l’aide des chiffres
plantureux, des graphiques savoureux, des commentaires généreux distillés par
d’onéreux experts lors de pompeux sommets et forums. La réalité locale vous
opposera toujours, aussi longtemps que durera la farce, des visages miséreux,
des regards vitreux, des cadres véreux, des rapports de contrôle sulfureux, un
chômage douloureux, un système de gouvernance fiévreux, un système de santé
défectueux, un système d’éducation scabreux, un système de sécurité poreux…
Chers dirigeants africains, vous avez maintenant compris. Tout au moins,
vous êtes prévenus. Une sagesse burkinabè nous enseigne : « Quand le
canari se casse sur votre tête, il faut en profiter pour vous laver ». Il ne faut donc pas se tromper de responsabilités :
les Africains sont tenus à la construction de leur continent et leurs partenaires
ne peuvent être que conviés à appuyer cette œuvre. Inverser les rôles, c’est
renoncer tout simplement au développement. La forte dépendance des
économies africaines vis-à-vis de l’extérieur
n’est pas sans conséquence sur le choix des politiques publiques qui restent
imprimées par la volonté des donateurs. Un ancien président africain ne disait-il
pas que « l’aide la plus utile et la plus noble est celle qui vient de
nous-mêmes ». Il faut donc
que les pays africains sortent du piège de l’aide, et ce le plus
rapidement possible. Ceux d’entre eux qui en sont addicts doivent en être
sevrés, progressivement mais irréversiblement.
Dans ce monde où rien n’est gratuit, ne dit-on pas que celui qui prête la guitare
c’est celui qui impose la mélodie ? Dès lors, légitimement et
raisonnablement, si les pays africains veulent jouer et écouter leur propre mélodie,
pourquoi ne pas s’investir à acheter leurs propres guitares ?
Cheickna Bounajim Cissé,
L’émergentier
Economiste, essayiste et expert
des marchés bancaires africains, auteur des ouvrages « Les défis du Mali
nouveau, Amazon, 2013 », « Construire l’émergence, BoD, 2016 », « FCFA :
Face cachée de la finance africaine, BoD, 2019) », « Le sursaut :
refonder ou s’effondrer ? BoD, 2021 »
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