mardi 24 septembre 2019

Le marché des dupes, des entourloupes et des taupes



C'est un extrait de l'un de mes prochains livres "Les fables folâtres de la gouvernance bancaire". Cette fable est le premier épisode de la série "La couronne du requin-pèlerin".

En cette fin de période estivale, alors que le soleil déclina à la recherche de son gîte, une nouvelle inattendue retentit. Une jeune otarie, beurrée et apeurée, lança soudainement un cri strident qui déchira la quiétude vespérale. 


source : internet
Son bêlement ameuta sa comparse, un vieux phoque préoccupé à entretenir ses blanchons. En godillant, le pinnipède alla chercher gîte et couvert auprès du renard. Otocyon megalotis, féru de ses vibrisses drues, entretint sa pilosité. Oto ! Il y a un grave danger. N’as-tu pas entendu l’appel au secours de Dame otarie, grogna le phoque ? Comment peux-tu en douter avec mes esgourdes, retorqua le félin ? Que sais-je, rechérit le phocidé visiblement irrité par la remarque de Oto, les renardeaux ne sont-ils pas aveugles et sourds à leur naissance ? Cessons de discuter pour si peu, il y a mieux à faire. Ensemble, par reptation et par bonds, ils parvinrent tant bien que mal à retrouver la lionne de mer cachée entre les grèves de galets et les roches.

Pourquoi tu rugis ? s’exclamèrent le phocidé et le canidé. Pour tout mot, la lionne de mer encore tremblante d’effroi indexa l’horizon. Il faut souligner que pour survivre aux multiples guéguerres de leur riveraineté, les trois mammifères et leur coterie développèrent des comportements extrêmement grégaires. Ils partagent les repas et les trépas et s’invitent aux fêtes et aux tempêtes.

De loin, notre belle triplette vit un requin-pèlerin, la tête hors de l’eau quelque peu dissimulée par le temps brumeux, mais assez visible pour apercevoir dans sa grande gueule une sublime grosse couronne en… or. Pour un prédateur réputé édenté, ce fut vraiment une découverte surprenante.



source : internet
Le groupe de mammifères décida de ne pas s’approcher davantage. Sans tarder, ils prennent leurs antérieurs et leurs postérieurs à leur cou pour porter la nouvelle à la meute. En cours de route, ils croisèrent les orques bagagistes affairées à scruter la direction du vent pour sonder l’avenir du présent afin de préserver le passé du futur. Il faut rappeler que dans leur course effrénée à la dernière place du podium, les trois cétacés perdirent un des leurs qui eût déclaré forfait. En rivalité ouverte avant d’être en désaccord, ils durent sceller leur désunion. 


source : internet

Clémenceau avait vu juste quand il déclara que pour diriger, il faut un nombre impair, et que trois c’est déjà trop. Toujours est-il que depuis cette mésaventure, les deux rescapés élurent domicile dans les berges rocailleuses des cours d’eau et les flancs des collines, les creux des arbres et les croisements de routes, les fourmilières et les termitières, bref tous les lieux sacrés et sacralisés censés abriter les abris des démons les plus redoutables. Dans l’imaginaire populaire, les épaulards sont réputés pour leurs pouvoirs présumés mythiques et mystiques. Tout y passe, pots et suppôts, décoctions et lotions, fragrances enivrantes et envoutantes. Les gris-gris, amulettes et talismans sont soigneusement dissimulés dans les ailerons et même… les mamelles de ces cétacés. Pourtant, ces super-prédateurs se défendent de telles pratiques maléfiques et diaboliques, iniques et cyniques, amplifiées par les supposées victimes de leurs imprécations et de leurs exécrations qui tiennent comme par extraordinaire leur santé en bandoulière, déambulant entre praticiens de ville et tradipraticiens de brousse.
La mauvaise nouvelle parvint au grizzli, Ursus arctos horribilis. L’air débonnaire et la démarche pesante, ce colosse attaque rarement mais ne tolère point qu’on s’aventure dans sa riveraineté. Les scientifiques s’accordent à dire qu’une seule de ses morsures exerce une pression de 8 millions de pascals, assez puissante pour broyer une boule de bowling. Pourtant, ondulant et attachant, l’ursidé reste très attaché aux consignes de son maître. A l’époque, en haut lieu de dévotion, il n’a pu retenir son émotion pour renouveler son allégeance à son mentor. A l’apparence, ses oraisons furent de peu d’utilité à l’intrépide félidé qui continue à méditer à mille lieues, à la périphérie de la réalité et au vestiaire du futur, cette vérité primaire des paroliers africains : « Quand la sagesse ne réussit pas à vous enseigner, les circonstances finissent par le faire. ».

« Gouti ! Le requin édenté a poussé une grosse dent en or ! », bafouilla l’otarie encore tétanisée par sa trouvaille. À ces mots, le grizzly à l’ouïe fine et à l’odorat affiné se dressa de tout son long pour balayer l’horizon. 

source: internet

À la vue de l’insistant visiteur encombrant, il s’affaissa de tout son poids. Ce qu’il craignit depuis fort longtemps est au seuil de sa tanière. Pour toute réponse, le grand ours s’emmura dans un silence assourdissant devant les yeux riboulants des cétacés et du canidé. Il décida de s’effacer le temps que l’orage s’estompe. Il eut certainement oublié que ce n’est pas en cachant ou en cassant le thermomètre que la fièvre s’estompera.

Le groupe de mammifères, ébaubi par la réaction de Gouti, décida de poursuivre leur chemin. Le trio atteint de toc (trouble obsessionnel compulsif) se transporta chez le trio de choc (caractère hautement obsessionnel compulsif). Arrivé aux pénates des gardiens du temple hanté, les mammifères trouvèrent la girafe, l’hippopotame et le scorpion, déjà aux faits dernières nouvelles. Après le récit détaillé et coloré des visiteurs du jour, chacun des hôtes prit la parole.

L’hippopotame concéda que bien qu’il soit un animal amphibie, à l’aise sur terre ferme que dans l’eau douce, il ne put se mouvoir dans les eaux saumâtres. Essentiellement herbivore, ce géant aquatique compte parmi les animaux les plus dangereux de la planète. Dard en avant, le scorpion avoua aussi son incapacité actuelle à se hasarder dans l’eau. Sinon, il y a de cela des centaines de millions d’années, il fut un excellent nageur capable de parcourir les fonds des mers et des océans. Il promit de mettre à la disposition du groupe son terrible venin qui est un puissant mélange de neurotoxines. Enfin, la girafe fluette, le cou en avant et marchant l’amble, confia qu’elle ne put se mouvoir en milieu aquatique. Par contre, ayant le sommeil léger (moins de 2 heures par 24 heures), elle se proposa d’assurer à elle seule la surveillance de l’horizon, de jour comme de nuit.

Par cette avalanche d’handicaps, le trio de feu aurait pu bien glacer les ardeurs des frondeurs, n’eût-été la détermination de ceux-ci. Pour ne pas demeurer en reste, ils décidèrent de faire chemin ensemble. La décision fut prise de s’en référer au sultan le prothésiste.

Dans un vacarme confus de mugissement, de grognement, de rugissement et de jappement, la meute arriva au cabinet du sultan le prothésiste dentaire.

« Sir ! Sir ! Sir ! », s’écrièrent à l’unisson les mammifères en rangs dispersés.

« Quel est cet attroupement en mon logis ! Ne vous-ai-je pas suffisamment intimé à plus d’ordre et de discipline ! »

« Sir ! Qu’il vous plaise de nous excuser pour une si grande insistance. L’heure est grave ! », trompeta Oto à la tête du cortège.

« Maître renard, que fait Dame otarie dans vos bras ? Est-elle veule ou bégueule ? »

« Sir, elle présente un trouble obsessionnel compulsif. Dans notre jargon, ça s’appelle le TOC. »

 « Oto, avez-vous changé de métier à mon insu ? Etes-vous un médecin ? Allez-y à l’essentiel avant que je ne vous congédie pour de bon ! », fulmina le sultan.

« Sir ! Le requin édenté a une dent et… elle est en or ! », bafouilla le félin.

« Ne dites pas un mot de plus, répliqua le maître de céans. Je suis parfaitement au courant. C’est pour si peu d’inquiétude que vous troublez ma quiétude ? »

« Sir, nous implorons votre mansuétude pour nos platitudes ! », répéta à la cantonade la meute.

« Alors, écoutez-moi bien maintenant. Et je ne me répèterai pas. Vous vous êtes toujours trompé au sujet du Cetorhinus maximus. A l’origine, le requin-pèlerin n’est pas édenté. Sa mâchoire est garnie de plus de 3 000 petites dents qui ne lui servent qu’à ingurgiter le plancton. Pour éviter tout risque de morsure létale, des émérites odontologistes et moi-même avions décidé de lui arracher toute sa dentition et lui avions posé une seule prothèse. De quoi donner à ce planctonivore toute une vie pour écumer et filtrer les fonds marins à la recherche de sa pitance. Rassurez-vous, tout est sous contrôle ! »

« Sir ! Qu’il vous plaise de pardonner notre insistance. Etes-vous sûr qu’avec cette seule dent, il ne nous mordra pas ? », glapit le renard tout en chaleur.

« Votre imagination relève de la cryptozoologie. Ne vous fiez pas à son titre de super-prédateur. Le requin-pèlerin n’est pas un monstre marin. Certes, c’est le deuxième plus grand poisson au monde par la taille, mais il est solitaire et totalement velléitaire. Et puis c’est un animal pélagique qui ne peut s’aventurer à la surface de l’eau a fortiori sur la terre ferme. Franchement, mes chers terriens rien à y craindre ! »

« Sir ! Pourtant sa dent brille de mille feux ! », jappe encore le félin soutenu par une bande de félons.

« Diantre ! Que vous arrive-t-il enfin ? Sa couronne prothétique n’est ni en argent, ni en vermeille encore moins en or. Elle est seulement en nickel-chrome. C’est la lueur des rayons solaires qui lui donne cet aspect de brillance qui n’est en réalité qu’un leurre ! Mieux, pour se rassurer davantage, le requin a été marqué par plusieurs balises qui nous permettent de suivre le moindre de ses faits et gestes. », répond candidement le sultan prothésiste.

« Maintenant, retournez à vos occupations ! Je vous ai suffisamment entretenu. Vous avez mieux à faire qu’à dire. Et moi aussi, j’en ai assez d’écouter vos balourdises et couardises. Comment un requin qui n’a pas pu dompter ses requineaux peut-il vaincre des centaines d’entre vous, plus véloces et féroces ? Soyez un peu réalistes ! »

Le prothésiste, habitué au maniement rêche et revêche des mots, pensait s’en tirer à si bon compte. Son plan savamment ourdi depuis de longs mois était presque parfait. Sauf à quelques détails près. Il ne savait pas que la denture du requin-pèlerin était spéciale. C’est l’un des rares animaux au monde dont les dents se renouvellent automatiquement quand elles se cassent ou tombent. Mieux, Dame nature lui a doté des centaines de dents en réserves dissimulées sous le palais. De même, si le pèlerin habite dans le fond des océans généralement à plus de 2 000 mètres de profondeur, il aime aussi se trémousser à la surface des eaux côtières et même s’aventurer près des terres. La deuxième erreur du prothésiste tenait plus à de l’impudence qu’à de l’imprudence. A ce niveau de responsabilité, il ne pouvait ignorer cette formule de bon sens : Tout ce qu’un esprit humain peut concevoir, un autre est capable de le comprendre. Autrement dit, tout ce que vous pouvez faire, d’extraordinaire ou d’exceptionnel, quelqu’un d’autre plus docte est capable de le défaire, de le refaire et même de le parfaire. En dernier lieu, il faut rappeler qu’on ne gagne pas une guerre parce qu’on est plus nombreux ou mieux équipé que le camp adverse. On la gagne parce qu’on a une vision et une organisation capable de soutenir la stratégie qui en découle.

A suivre…



Cheickna Bounajim Cissé, l’émergentier

samedi 14 septembre 2019

Monnaie et compétitivité : cas de la Zone franc

L’Afrique, la nouvelle frontière de la croissance mondiale ? D’accord ! Mais l’Afrique, le grand absent du festin mondial aussi ! Depuis des décennies, toutes les puissances du monde accourent pour y faire leurs emplettes, tantôt pour se (re)construire, tantôt pour se renforcer de l’impuissance des pays africains et de l’indifférence de leurs dirigeants.
Avec presque 20% de la population mondiale, le continent africain représente à peine 3% des échanges internationaux et 5% du PIB mondial. En cause, entre autres, leur niveau de compétitivité est faible alors que leurs potentialités agricoles et minières sont énormes. Une bonne partie des pays africains en panne de compétitivité se trouvent dans la Zone franc et ont en commun le franc CFA comme monnaie officielle. Quelle est la situation réelle dans cette région de l’Afrique ?
Les liens entre monnaie et compétitivité[1] sont tellement étroits que la première pourrait être la gâchette et la seconde l’arme. Dès lors, est-il étonnant que la première mesure de la compétitivité soit basée sur le taux de change de la monnaie ?

A-   Des indicateurs de compétitivité en berne dans la Zone franc

Mesurer la compétitivité est un exercice difficile et complexe. Au niveau international, les indicateurs de compétitivité sont en général controversés. Pour autant, ce sont des outils d’aide à la décision qui sont nécessaires dans un environnement mondial de plus en plus compétitif.

1-      L’indice de compétitivité mondiale

Depuis 1979, le Forum économique mondial (World Economic Forum), souvent appelé Forum de Davos, publie chaque année une étude sur la compétitivité mondiale. Le 17 octobre dernier, il a révélé son classement 2018 des 140 économies nationales étudiées selon l’indice de compétitivité mondiale.



Les pays africains de la Zone franc (PAZF) se perdent dans les profondeurs du classement mondial de la compétitivité globale du Forum Economique Mondial. Avec un score nettement en dessous de la moyenne (60/100), ils se situent dans les trente dernières économies mondiales. En queue de classement, la Côte d’Ivoire et le Cameroun, présentées comme les locomotives de l’UEMOA et de la CEMAC, se situent respectivement à la 114e place et à la 121e de l’indice de compétitivité mondiale.

2-      Le climat des affaires

L’indice de la facilité de faire des affaires du « Projet Doing Business » a été créé en 2003 par l'International Finance Corporation (IFC) du groupe de la Banque Mondiale pour mesurer la réglementation des affaires et son application dans 190 économies dans le monde.


A l’exception de la Côte d’Ivoire (122e) et du Togo (137e/190), tous les pays africains de la Zone franc (PAZF) se situent dans les 50 dernières places du classement de la Banque Mondiale. Même dans ces profondeurs, les disparités sont saisissantes entre les deux unions monétaires. Si quelques progrès sont enregistrés dans la zone UEMOA, la CEMAC montre un visage pâle avec un score en dessous de la moyenne. Dans cette zone, trois pays, à savoir la Centrafrique, le Congo et le Tchad font partie des dix dernières économies du Doing Business 2019. Il apparait clairement, de l’avis même des spécialistes[2], que les résultats des PAZF sont nettement inférieurs à ceux de pays comparables en Afrique et en Asie.

B-   Des points de vue contrastés

Pour l’économiste togolais Kako Nubukpo, professeur de Sciences Economiques à l’université de Lomé, « les économies de l’UEMOA souffrent d’un problème de compétitivité-prix à l’export, du fait de l’arrimage du franc CFA à l’euro, monnaie forte s’il en est. Or, une monnaie forte agit comme une taxe sur les exportations et une subvention sur les importations, rendant difficile l’obtention de l’équilibre de la balance commerciale[3] ». Ce point de vue est-il partagé ?

1-      Le point de vue des Autorités communautaires

Ces dernières années, la BCEAO a produit deux rapports spécifiques sur la compétitivité des économies de l’UEMOA, l’un sur la période 2002-2011 et l’autre sur l’année 2012. Relativement à la période décennale (2002-2011), les conclusions de l’étude de la BCEAO se présentaient ainsi : « Appréciée  de  manière  globale,  à  partir  de  l’évolution  du  taux  de  change  effectif  réel,  la  compétitivité globale  des  économies  de  l’Union  Monétaire  s’est  détériorée  au  cours  de  la  période  2002-2011,  en  rapport  avec  la  dépréciation  des  monnaies  des  pays  partenaires  sur  les  dix  dernières  années,  dont  l'impact a été atténué par une différentiel d’inflation favorable à l'UEMOA vis-à-vis de l’ensemble de ses  partenaires. Toutefois, le ratio d'investissement relatif s'est accru au cours des dix dernières années, indiquant une progression des efforts d'investissement dans l'UEMOA, en rapport notamment avec l'afflux d'investissement dans le secteur minier et la conduite de grands chantiers dans plusieurs pays.  Toutefois, le ratio d’investissement relatif de l'UEMOA est demeuré inférieur à 100, traduisant un taux d'investissement de l'Union plus faible que celui de ses principaux partenaires. En matière de performance du commerce extérieur, la dernière décennie a été marquée par une faible augmentation du taux d'exportation qui est passé de 31,9% en 2001 à 34,0% en 2011. Cette relative atonie du taux d'exportation dans l'Union reflète l'absence de changements qualitatifs majeurs dans la structure des exportations de la Zone, qui restent dominés par des produits primaires. La dégradation de la position concurrentielle observée au niveau du taux de change effectif réel est confirmée par l'évolution du taux de pénétration étrangère qui a affiché une progression de 0,3 point de pourcentage en moyenne par an.  Ce résultat traduit une augmentation de la part du marché dans l'Union acquise par les entreprises étrangères, et donc une perte nette de compétitivité sur le marché intérieur des pays de l'Union. Les évolutions observées au niveau des coûts de facteurs de production ne sont également pas de nature à accroître le niveau de la compétitivité des économies de l'UEMOA.  En effet, les coûts des principaux facteurs de production ont augmenté sur les dix dernières années. En particulier, les coûts des produits pétroliers et de l'électricité se sont accrus et sont plus élevés que ceux des principaux partenaires africains de la région. »
Récemment, dans le Rapport sur la Politique Monétaire dans l'UMOA de mars 2019, la BCEAO a fait le point de la « Compétitivité extérieure » de ses États membres : « Le taux de change effectif réel (TCER) a baissé de 2,5% au quatrième trimestre 2018 par rapport à la même période de l'année passée. Cette évolution traduit un gain de compétitivité, lié principalement au différentiel d'inflation favorable à l'Union (-3,0%) par rapport à ses partenaires, atténué par une légère hausse du taux de change effectif nominal (+0,5%). L'évolution du taux de change effectif nominal au quatrième trimestre 2018 est en ligne avec l'appréciation, en rythme annuel, du franc CFA par rapport à la roupie indienne (+7,8%), au cedi ghanéen (+5,9%), au rand sud-africain (+1,3%) et au yuan chinois (+1,4%). En revanche, le franc CFA s'est déprécié par rapport au dollar américain (-3,1%), au naira (-2,8%) et au franc suisse (-2,3%). Le taux d'inflation dans l'Union s'est situé à 0,9% au quatrième trimestre 2018 contre une hausse de 3,9% en moyenne dans les pays partenaires. »

2-      Le point de vue du Fonds Monétaire International (FMI)

Le FMI distingue deux types de compétitivité : la compétitivité des prix (compétitivité à court terme) et la compétitivité structurelle (compétitivité hors prix). La première est relative à la monnaie (son taux de change effectif réel[4]) tandis que la seconde (compétitivité structurelle) est mesurée par les indicateurs de climat des affaires (enquête Doing Business), de compétitivité mondiale, de performance logistique et de gouvernance.

S’agissant de l’UEMOA

Dans son rapport (n° 2018/106) de mai 2018, le FMI a donné son avis sur la compétitivité des pays de l’UEMOA.

  • Compétitivité des prix (Évaluation de la position extérieure) : D’après les services du FMI, la surévaluation du taux de change effectif réel (TCER) de l’UEMOA serait négligeable, entre 0,4 % et 1,8 %. Ils estiment que la position extérieure (« EBA-lite ») de cette zone est globalement en cohérence avec les fondamentaux et les politiques souhaitables, en dépit du renforcement récent de l'euro (auquel est arrimé le FCFA de l'UEMOA) par rapport au dollar 
  • Compétitivité structurelle : Pour le FMI, la compétitivité de l’UEMOA reste entravée par des contraintes structurelles importantes, notamment les insuffisances d’infrastructure, les coûts élevés des intrants tels que la communication, le transport et l’électricité et la faiblesse du cadre commercial et règlementaire. À en croire les indicateurs de gouvernance de la Banque mondiale, les scores en matière d'efficacité de l'administration, de stabilité politique, de qualité réglementaire et d'État de droit restent faibles, par rapport à des pays comparables.
Dans la zone UEMOA, la couverture des importations prospectives extrarégionales de biens et services par les réserves extérieures s’est établie à 4,2 mois à fin 2017. Elle devrait atteindre 4,6 mois d'ici à 2022. Les estimations des services du FMI suggèrent que les réserves extérieures de l'UEMOA devraient idéalement se situer dans une fourchette de 5 à 7 mois d’importations prospectives de biens et de services extrarégionales.
Les services du FMI soulignent que « la garantie de convertibilité à parité fixe du franc CFA avec l’euro joue le rôle de mécanisme d’assurance contre le risque d’insuffisance temporaire et exogène de liquidité extérieure. (…) Bien que difficilement quantifiable, la valeur de la garantie de convertibilité par la France qui renforce les réserves externes de l’UEMOA peut être appréciée d’un point de vue qualitatif, car les agences de notation la considèrent comme un facteur qui minimise le risque de crise de balance des paiements. »

CEMAC

Dans son rapport (n° 19/1) de février 2019, le FMI a fait le point sur la compétitivité des pays de la CEMAC.

  • Compétitivité des prix : Pour les services du FMI, les évaluations du solde des transactions courantes et du taux de change effectif réel (TCER) en 2018 semblent indiquer une légère surévaluation du taux de change et une faiblesse plus marquée de la position extérieure par rapport aux paramètres fondamentaux et aux politiques souhaitables.
  • Compétitivité structurelle : Selon les indicateurs de la conduite des affaires de la Banque mondiale (enquête « Doing Business »), les services du FMI ont noté que les progrès enregistrés au classement de la conduite des affaires sont hétérogènes dans la zone CEMAC. Ainsi, entre 2015 et 2018, le Cameroun, la République centrafricaine et le Tchad ont relativement bien progressé, tandis que d’autres pays n’ont guère évolué ou ont même connu une détérioration de la qualité du climat des affaires, notamment le Gabon. En outre, constatent les services du FMI, les indicateurs de gouvernance semblent aussi indiquer des résultats décevants pour les pays de la CEMAC. Selon les « indicateurs de gouvernance » de la Banque mondiale, les pays de la CEMAC sont en retard par rapport aux pays comparables de l’UEMOA et aux pays émergents. 
Dans la zone CEMAC, les réserves de change devraient s’améliorer pour assurer près de 5 mois d’importations d’ici 2022, contre 2,6 mois d’importations à fin 2018.
De façon générale, le rapport du FMI fait observer que « les pays de la CEMAC accusent un retard par rapport aux pays comparables de l’UEMOA. La faiblesse des résultats enregistrés par les pays de la CEMAC se retrouve dans toutes les sous-composantes des indicateurs généraux de la conduite des affaires, les obstacles les plus prononcés étant dans les domaines de la création d’entreprises, du raccordement au réseau électrique, de l’octroi de permis de construire, de l’exécution des contrats, et du commerce transfrontalier. En outre, le manque d’infrastructures adéquates et d’approvisionnement fiable en énergie reste problématique, sans parler des procédures de paiement des impôts et de transfert de propriété qui demeurent complexes ».  Pour le FMI, ces écarts d’estimation entre l’UEMOA et la CEMAC semblent raisonnables, compte tenu des différences entre les deux unions monétaires sur le plan de la dépendance aux ressources naturelles, de la diversification économique et de la volatilité de la balance des paiements.

Cheickna Bounajim Cissé, L’émergentier.


[1]Pour l'Observatoire Français des Conjonctures Économiques (OFCE), « la compétitivité reflète la capacité des entreprises d’un pays à exporter ses produits et/ou à les vendre sur son marché intérieur. Elle dépend non seulement des prix relatifs à l’exportation et donc des coûts relatifs de production, mais également de facteurs dits hors-prix qui recouvrent la qualité des produits, le contenu en innovation, le design ou l’image de marque qui peuvent être liés ou non aux facteurs précédent » ; en ligne : « La quête de la compétitivité ouvre la voie de la déflation », Revue de l'OFCE, 2013/3 (N° 129), p. 251-297. DOI : 10.3917/reof.129.0251. URL : https://www.cairn.info/revue-de-l-ofce-2013-3-page-251.htm. Selon l'OCDE, il s'agit de « la capacité d'entreprises, d'industries, de régions, de nations ou d'ensembles supranationaux de générer de façon durable un revenu et un niveau d'emploi relativement élevés, tout en étant et restant exposés à la concurrence internationale. »
[2] Fonds Monétaire International (FMI), Rapport n° 2018/106 de mai 2018 sur l’UEMOA et Rapport n° 19/1 de février 2019 sur la CEMAC.
[3] En ligne : www.jeuneafrique.com/360706/economie/bonnes-feuilles-sortir-lafrique-de-servitude-monetaire-a-profite-franc-cfa/
[4] Le taux de change effectif réel est le prix relatif intérieur comparé à la moyenne des prix des partenaires convertis en monnaie nationale. Le taux de change effectif réel d’un pays permet d'établir dans quelle mesure les variations des taux de change, des prix ou des coûts, dans différents Etats partenaires et concurrents étrangers influencent la compétitivité du pays concerné. Une appréciation du taux de change effectif réel (TCER) est associée à une perte de compétitivité et une dépréciation de cet indice traduit un gain en la matière (Source : BCEAO, Rapport sur la compétitivité des économies de l’UEMOA, juin 2013).

lundi 12 août 2019

Monnaie unique de la CEDEAO : L’échéance 2020 est-elle tenable ?


L’émergentier Cheickna Bounajim Cissé, auteur de « FCFA - Face Cachée de la Finance Africaine » (BoD, 2019), analyse les enjeux et les contours de la future monnaie unique de la CEDEAO. (5e partie du dossier "Les échos de l'ECO")
(Financial Afrik a publié le dossier complet. A lire avec le lien suivant : https://www.financialafrik.com/2019/07/21/les-echos-de-leco/)

La monnaie unique de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) était attendue et désirée. Avec espoir et crainte. La voilà… Pourrait-on d’ailleurs en dire : Enfin ! Une gestation bien particulière, trois voire quatre décennies d’attente, avec pas moins de quatre fausses couches (2003, 2005, 2009, 2015). Maintes fois annoncée, autant de fois repoussée, la future monnaie de la CEDEAO a été baptisée officiellement « ECO » par la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement tenue le 29 juin 2019 à Abuja, au Nigéria. C’est un évènement historique pour les populations de cet espace communautaire, à qui leurs dirigeants promettent la mise en circulation des premiers billets dès 2020. 


Créée par le Traité de Lagos le 28 mai 1975, la CEDEAO regroupe 15 Etats membres répartis dans deux zones monétaires, à savoir l’Union monétaire ouest-africaine (UMOA), créée le 12 mai 1962, qui comprend le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Togo, et la Zone monétaire ouest-africaine (ZMOA), créée le 20 avril 2000, composée de la Gambie, du Ghana, de la Guinée, du Liberia, du Nigeria, de la Sierra Leone. Le Cap-Vert, bien que membre de la CEDEAO, ne fait partie d’aucune de ces deux zones monétaires. Là, depuis près d’une décennie, il s’y déroule un étrange tour de passe-passe monétaire entre pays « convergents » (UMOA) et pays « divergents » (ZMAO), de quoi donner le tournis aux populations ouest-africaines qui sont totalement immunisées contre les fausses promesses de leurs dirigeants. 

Actuellement, il y a huit monnaies différentes, pour l’essentiel non convertibles, qui circulent dans l’espace CEDEAO. En plus du franc CFA utilisé par les huit Etats membres de l’UMOA, les sept autres pays ouest-africains ont chacun leur propre devise (Cédi, Dalasi, Dollar libérien, Escudo cap-verdien, Franc guinéen, Leone, Naira). Il y a deux types de régimes de change en cours dans l’espace CEDEAO : un régime de change fixe dans la zone UMOA et au Cap-Vert et un régime flexible dans les pays de la ZMOA. Deux monnaies sont arrimées à l’euro à parité fixe, à savoir le franc CFA (accord de coopération monétaire avec la France de décembre 1973) et l’escudo cap-verdien (accord de coopération monétaire avec le Portugal de mars 1998). A terme, les huit monnaies en circulation dans l’espace CEDEAO devront disparaître pour laisser place à l’ECO. 


La CEDEAO en quelques chiffres

La CEDEAO est l’une des huit communautés économiques régionales (CER) formellement identifiées par l’Union africaine (UA) comme étant les piliers de l’intégration continentale. Elle a des mensurations des plus respectables :

-          Marché de 367 millions de consommateurs (5% de la population mondiale ; 3e « pays » du monde, après la Chine et l’Inde et devant les États-Unis) ;
-          Superficie de 5 120 945 km² (3,4% des terres de la planète ; 7e « pays » du monde, devant l’Inde et derrière l’Australie) ;
-          PIB de 551 milliards de dollars (20e économie mondiale) ;
-          Commerce extérieur de 144,4 milliards de dollars US en 2016 (1,1% du commerce mondial). Cependant, les échanges intra-communautaires sont très faibles. Seulement 10,6% des exportations et 7,8% des importations sont réalisées entre les pays membres de la CEDEAO ;
-          Ressources agricoles, hydrauliques et minières exceptionnelles (parmi les plus importantes du monde). 


La future Zone ECO ressemblera étrangement à sa devancière européenne, la Zone EURO. La superficie et la taille de la population sont presque identiques. Mais là s’arrête la similitude entre les deux unions monétaires. Avec un PIB de 12 635 milliards de dollars US en 2017, la Zone EURO a réalisé en seulement 16 jours l’équivalent d’une année de production de la CEDEAO. Le niveau de vie de l’Européen moyen, mesuré par le PIB par habitant (33 229 euros), est supérieur de 24 fois à celui de l’Africain moyen vivant dans l’espace CEDEAO (1 370 euros).

Convergence vs divergence

Les dirigeants de la CEDEAO font du respect des critères de convergence un préalable au lancement de la monnaie unique. Cet avis est partagé par beaucoup d’économistes[1]. Pourtant, pour les experts de la Banque africaine de développement (BAD), cet argument ne résiste pas à une analyse rigoureuse. Pour l’institution financière continentale, la convergence « doit être vue comme un objectif permanent et non comme une condition préalable à l’adhésion à une union monétaire ». Elle ajoute que « l’absence de convergence économique ne doit pas être un obstacle infranchissable, même s’il faut la rechercher dans un processus d’intégration monétaire visant la création d’une monnaie unique. Les pays doivent donc apprendre à vivre avec la monnaie unique tout en acceptant un niveau raisonnable de divergence entre leurs économies. La solidarité entre les pays membres, qui passe notamment par les transferts entre états, peut atténuer les impacts de ces divergences sans les éliminer totalement.[2] »



Rapport de convergence macroéconomique 2018 de la CEDEAO
La CEDEAO a enregistré une croissance de 3,0% en 2018 contre 2,3% en 2017. Elle devrait connaître une croissance de 3,4% en 2019. 

En ce qui concerne l'état de la convergence macroéconomique en 2018, le rapport a indiqué que les performances des États membres se sont légèrement détériorées par rapport à celles de 2017. Quant aux performances au titre des critères primaires en 2018, on observe que la situation s'est détériorée pour le critère du déficit budgétaire, vu que cinq (5) pays respectent la norme, contre sept (7) en 2017. Par contre, l’on a noté des améliorations en termes de conformité aux critères relatifs à l'inflation et au financement du déficit budgétaire par la Banque centrale avec un pays supplémentaire, portant respectivement à 12 et à 14 le nombre total de pays qui respectent ces critères. La performance au titre du critère des réserves brutes en mois d’importations est restée stable en 2018 avec quatorze (14) pays comme en 2017. 

Globalement, aucun pays n’a respecté tous les critères de convergence en 2018 contre trois (3) en 2017. Seuls deux (2) pays ont respecté tous les critères de convergence de premier rang en 2018 contre quatre (4) en 2017. Cependant, onze (11) pays ont respecté tous les critères de second rang en 2018 contre dix (10) pays en 2017.
En ce qui concerne les performances au titre des critères secondaires en 2018, les États membres ont obtenu des résultats améliorés en termes de stabilité du taux de change nominal ; deux (2) pays supplémentaires ont rempli les critères, ce qui porte à quatorze (14) le nombre total de pays. S’agissant de la conformité au critère de la dette publique, la situation est demeurée inchangée, avec douze (12) pays respectant la norme en 2017 et 2018.




Aucun pays de la CEDEAO n’a respecté tous les critères de convergence en 2018. A moins d’un semestre de l’échéance tant attendue, tel est le constat alarmant fait par le Président du Comité technique sur le Programme de la Monnaie Unique de la CEDEAO, Dr. Moses Tule, par ailleurs Directeur de la politique monétaire de la Banque centrale du Nigeria (CBN). Dans son rapport sur la convergence macroéconomique (encadré ci-dessus) présenté devant le Comité ministériel des 17-18 juin 2019, il indique que les performances des États membres se sont même légèrement détériorées par rapport à celles de 2017. Pour y voir plus clair, le Comité a recommandé que les pays transmettent à la Commission de la CEDEAO leurs programmes pluriannuels de convergence pour la période 2020-2024, d’ici le 31 octobre 2019.

A moins de cinq petits mois de l'échéance 2020, la réalité imposera-t-elle de nouveaux ajustements de calendrier ?

La réponse est contenue dans le communiqué de la cinquante-cinquième session ordinaire de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO du 29 juin 2019 à Abuja, au Nigéria et dans le Rapport final de la réunion du Comité ministériel sur le programme de la monnaie unique de la CEDEAO tenue à Abidjan, les 17-18 juin 2019.

Au-delà des aspects politiques, deux contraintes techniques essentielles peuvent se poser, à savoir le financement du projet de la monnaie unique et le respect des critères de convergence.

Sur le premier point, le Comité Ministériel a déploré « le retard dans l'exécution de certaines activités de la feuille de route en raison de contraintes de ressources humaines et financières des institutions en charge de leur mise en œuvre ». En clair, le financement du projet de la monnaie unique de la CEDEAO n’est pas bouclé. Dans la coutume malienne, on a l'habitude de charrier le jeune candidat au mariage quand il estime que toutes les formalités sont acquises sauf le grisbi. Il lui ait alors rappelé que si ça ne reste que ça alors les préparatifs du mariage n'ont même pas commencé.

Pour ce qui est du second point, comme indiqué plus haut, les dirigeants ouest-africains ont opté pour une « approche graduelle », en privilégiant le démarrage avec les Etats membres qui respectent les critères de convergence. Ce faisant, ils ont validé la démarche prudente (Option 2) préconisée par la réunion inaugurale du Groupe de travail présidentiel organisée en février 2014 à Niamey, au Niger. Ce choix comporte le risque majeur que l’union monétaire de la CEDEAO ne soit qu’une version évoluée de l’UMOA. Autrement que l’ECO ne soit qu’un « clone » du franc CFA, comme le prédisent les mauvaises langues[3]. En effet, s’il y a de fortes chances, à la ligne de départ en 2020, qu’on ne puisse compter que les huit pays de l’UMOA, avec peut-être le Cap-Vert et dans une moindre mesure le Ghana, le forfait du géant nigérian est quasi certain à cette date[4] 


Les économistes de la BAD Ferdinand Bakoup et Daniel Ndoye semblent partager cette inquiétude. Ils auraient préféré, pour ne pas « affecter la crédibilité du processus », la mise en œuvre de l’option du « Big-Bang ». Ce scénario consiste à un démarrage groupé de tous les 15 pays de la CEDEAO à l’échéance de 2020, quitte à prendre quelques largesses avec les critères de convergence[5].  Néanmoins, la BAD attire l’attention sur certains points de vigilance : « Trois mesures critiques, qui ne sont pas à ce jour prises en charge suffisamment, devraient être pleinement mises en œuvre pour respecter l’échéance 2020 : (i) élaboration de la stratégie et des procédures de la politique monétaire unique de la future union monétaire de la CEDEAO ; (ii) élaboration d’un traité instituant l’union monétaire entre les pays membres de la CEDEAO et sa ratification dans tous les pays membres ; et (iii) élaboration, adoption et ratification des statuts de la future Banque centrale de la CEDEAO dans tous les pays membres. Idéalement, ces tâches devraient être réalisées avant 2017 pour un lancement de la monnaie unique en 2020 ».

Aussi, les experts de la BAD tiennent à rappeler deux principes essentiels dans la construction d’une union monétaire : le principe de l’équité et le principe de la solidarité. Ils s’expliquent : « Le cadre de gestion doit en effet assurer que chaque pays puisse bénéficier des réserves qu’il a permis de constituer. Mais il doit aussi prévoir des mécanismes qui permettent aux pays en grande difficulté d’accéder temporairement à des réserves provenant des autres pays, dans le but d’aider non seulement les pays en question, mais d’éviter toute répercussion sur la monnaie commune, comme l’illustre le cas actuel de la Grèce dans la Zone euro ».

Pour le respect de l’échéance 2020, la sagesse nous suggère de nous en tenir au réalisme du ministre togolais des Affaires étrangères du Togo Robert Dussey qui déclarait : « En 2020, nous sommes dans la dynamique de création de cette monnaie. Mais évidemment, il ne faut pas se leurrer, il n’y aura pas une monnaie palpable, un billet d’ECO que tout le monde verra en 2020.[6] »

En définitive, le Comité ministériel a peut-être raison quand il évoque « la longue marche[7] » vers la création de la monnaie unique de la CEDEAO. Les populations africaines patientent, impatiemment, depuis 30 ans voire 40 ans pour avoir les premiers billets d’ECO dans leur portefeuille. Il va falloir qu’elles fassent du temps leur meilleur allié. L’assemblage d’éléments dissemblables demande plus que de la patience. Il exige de la persévérance et de l’endurance. Le sage Li Er ne disait-il pas que le voyage de mille lieues a toujours commencé par un premier pas ?

L'émergentier.



[1] « La convergence des économies est souvent présentée dans la littérature comme une condition essentielle au succès de tout processus d’intégration monétaire. L’importance de la convergence trouve sa source dans la théorie des zones monétaires optimales de l’économiste canadien R. Mundell. Selon cette théorie, plusieurs facteurs peuvent entraver la viabilité d’une union monétaire – une forte asymétrie des chocs, une faible mobilité des facteurs de production au sein de la zone et l’absence de mécanismes de transferts –, les pays membres perdant l’usage de leur politique monétaire en tant qu’instrument d’ajustement aux chocs » ; en ligne : www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Publications/AEB_Vol_7_Issue_1_2016_POURQUOI_ET_QUAND_INSTAURER_UNE_MONNAIE_UNIQUE_DANS_LA_CEDEAO.pdf
[2] https://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Publications/AEB_Vol_7_Issue_1_2016_POURQUOI_ET_QUAND_INSTAURER_UNE_MONNAIE_UNIQUE_DANS_LA_CEDEAO.pdf
[3] https://cbcisse2.blogspot.com/2019/07/monnaie-unique-de-la-cedeao-divorce-ou.html
[4] https://cbcisse2.blogspot.com/2019/07/monnaie-unique-de-la-cedeao-nigeria.html
[5] En d’autres termes, tous les pays membres participeraient à la monnaie unique en 2020, et ceux qui ne pourraient pas respecter les critères de convergence ex ante pourraient le faire ex post.
[6] https://www.dw.com/fr/pas-de-billets-eco-en-circulation-dès-2020/av-49463237
[7] Réunion du Comité ministériel sur le programme de la monnaie unique de la CEDEAO, Rapport final, Abidjan, Côte d’Ivoire, 17-18 juin 2019.

jeudi 1 août 2019

MALI : CONTRIBUTION DE L'EMERGENTIER AU SURSAUT NATIONAL



CONTRIBUTION AU SURSAUT NATIONAL
(40 mesures + 2 quick wins)  


 « Il faut donner aux Maliens quelque chose à aimer : le Mali. »


Dire que la situation du Mali est difficile est un euphémisme. Aucun groupe de personnes, encore moins, aucun homme providentiel, ne peut venir à bout de la crise multidimensionnelle dans laquelle le Mali est plongé depuis plusieurs années.

Paradoxalement – sinon fort heureusement – dans cette situation complexe et protéiforme, le diagnostic semble relativement simple. Le plus petit dénominateur commun à tous les maux qui minent aujourd’hui le Mali se résume en quelques mots : la mauvaise gouvernance. Et ce fléau ne date pas d’aujourd’hui, même si des circonstances malheureuses (occupation du pays par des groupes irrédentistes et terroristes, coup d’Etat de 2012) l’ont propulsé récemment au devant de la scène nationale et internationale.

En toute vérité, si la révolution de mars 1991 a permis l’instauration du multipartisme, elle a aussi enfanté - sinon tout au moins amplifié - le laisser-aller, l’incivisme et la mauvaise gouvernance avec à la clé la démocratisation de la corruption. Presque tout le monde veut avoir tout, tout de suite. Et tout y passe pour y parvenir. A se demander si le pays n’est pas devenu un véritable pandémonium. Pourtant, tout le monde dénonce les fléaux de la corruption ; mais, presque personne ne veut renoncer à « l’argent sale », au « bien mal acquis »… En vérité, le Mali vit une vraie crise de patriotisme et de civisme.

Déjà en 1978, l’essayiste Yero Hamady rappelait qu’au Mali, on disait couramment « fèn bè ye wari de ye », autrement dit « tout s’achète ». A la suite, il s’interrogeait : « quel serait donc le prix de la dignité nationale ? ». Quatre décennies plus tard, la question n’a pas pris une seule ridule. On vend tout. On achète tout. Rien n’est trop grand. Rien n’est trop précieux. Tout, ou presque, se monnaye.

La fièvre de la corruption ne s’est jamais estompée même si le thermomètre, entre temps, s’est cassé. Certains susurrent qu’elle serait devenue un sport national – nullement, un jeu de garçonnets timides – dont les pratiquants et partisans ont fini par s’en faire un « cordon sanitaire ». Pour d’autres, c’est la première industrie du pays – puisque le poids de la vraie industrie est réduit à celui du duvet du colibri d’Elena. Pour beaucoup, ce qui était qualifié de « sourafèn » (littéralement traduit « la chose de la nuit ») du fait de son caractère répréhensible est devenu « tilefèn » (« la chose du jour ») du fait de sa banalisation. Pour tous, la corruption est un constat d’échec de la gouvernance. Il ne sera pas exagéré de dire qu'elle est la première cause de mortalité au Mali, tant elle prive le pays de ressources essentielles pour assurer le bien être des populations.

Quel est aujourd’hui le rapport du Malien à sa patrie ?

L’intérêt général n’a presque plus de valeur. Il est devenu une faribole. Il a peu de serviteurs et beaucoup de prédateurs. Celui qui s’en sert en le desservant est bien souvent adulé ; amis et proches le congratulent et le bénissent en vantant sa « réussite » pour avoir eu l’outrecuidance de le décimer, de le découper et de le distribuer à son aise. Celui qui s’en préoccupe en le préservant et en le promouvant est rejeté, puis traité de fou, d’aigri, de méchant, d’incapable, de faiblard et… de maudit. Gare à lui s’il venait à manquer de quelque chose !

Pourtant, la corruption est une insulte à la fierté nationale. Comment ne pas prendre un coup, un sacré coup, lorsqu’un étranger traite votre pays de « pays corrompu » ?

Que faire alors si aucun garrot, jusqu’ici, n’est parvenu à arrêter la saignée de l’argent public ?

Les sages aiment dire qu’« il n’y a pas de problème sans solution ; s’il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème ». Soit on vient à bout de la corruption, soit c’est notre survie sera en jeu, avec à la clé le devenir de notre nation. John T. Noonan disait qu’ « après la tyrannie, c’est la corruption qui est le grand mal des Etats [et que] plusieurs façons de soigner le mal s’offrent au bon médecin. » On connaît aussi le théorème d'Ashby, dit « théorème de la variété requise », qui s'énonce ainsi : « Plus un système est varié, plus le système qui le pilote doit l'être aussi. » La diversité des problèmes posés par la corruption au Mali appelle donc à des réponses différenciées.

Pourtant, la volonté politique existe et des efforts ont été faits et d’autres sont en cours. Mais face à l’immensité du fléau, ils demeurent insuffisants. Il faut donc amplifier la dynamique, accélérer la cadence en posant des actes plus vigoureux, en appliquant les bonnes solutions au vrai problème que constitue la mal gouvernance au Mali. Et dans cette chevauchée, le temps est un facteur essentiel. Et pour le moins, il n’est pas infini. Il est plus que précieux dans le cas du Mali, un pays convalescent presqu’alité, qui peine à sortir de la crise la plus grave de son histoire contemporaine. Il faut donc organiser, maintenant, la riposte nationale contre la mauvaise gouvernance : sortir du discours lancinant et des déclarations intempestives pour poser des actes efficaces, mesurables et durables à la dimension du fléau.

C’est un défi majeur pour le Mali. Et personne ne le relèvera à la place des Maliens. Aussi, il faut que les gouvernants comprennent qu’ils ne seront pas jugés sur leurs intentions, ni sur la grandiloquence de leurs discours mais sur la pertinence de leurs actes sur le terrain. Le Nobel français Albert Schweitzer avait coutume de dire : « L’exemplarité n’est pas une façon d’influencer, c’est la seule. » Pourtant, il ne sera pas juste de faire supporter la responsabilité de l’ampleur et de la persistance de la corruption aux seuls dirigeants politiques. Les paroliers nous enseignent que « si le bouc mord l’étranger c’est la honte au chien ». Dans l’acte de corruption, il y a toujours quelqu’un qui donne et quelqu’un d’autre qui prend. Ne pas donner, ne pas prendre et dénoncer est à la portée de chaque citoyen. Et c’est aussi un devoir et une responsabilité vis-à-vis de la nation et des générations futures.

Chaque Malien doit être responsable devant la Nation. Le sage Gandhi aimait dire à ses concitoyens : « Commencez par changer en vous ce que vous voulez changer autour de vous. »

Ne versons pas aussi dans l’angélisme ! La lutte contre la corruption ne se gagnera pas en un jour ou en une année. Il faut rester lucide, sans mettre la poussière sous le tapis. Il faut donc s’affranchir des remises en ordre inutilement spectaculaires, dont on doit faire l’économie avec une dose raisonnable d’explication, d’ouverture et d’humilité. Pas plus d’ailleurs que les accusations excessives, les amalgames maladroits et les règlements de compte dissimulés.

Autrement, il va falloir s’armer de volonté et d’actions pour avoir des résultats durables, tout en évitant de s’exposer à des spectacles désopilants au relent sensationnel, du genre « opérations coups-de-poing » qui consisteraient à embastiller quelques présumés responsables corrompus un certain temps, à les libérer ensuite sans que rien ne puisse être récupéré de ce qu’ils auraient prétendument détourné ; et puis que ceux-ci, après libération, se retournent contre l’État pour demander des « dommages et intérêts » ; et pour boucler la boucle, qu’ils se réinsèrent dans la vie politique ou administrative du pays comme si de rien n’en était à des positions meilleures, auréolées d’un nouveau parchemin, celui du « diplôme de la vie ».

Mais, convenons dès à présent, il n’y aura pas de répit ni de lutte au rabais. Aucune capitulation ne sera concédée. Mais, de grâce, ne nous engageons pas seulement lorsque les « vaches sont maigres », accélérons aussi la cadence lorsque « le génie sort de la bouteille ».  Et qu’enfin l’image et la réputation de notre beau pays, le Mali, soient sauves ! Et que son émergence puisse enfin s'amorcer !

Les actions, au long cours, qui s’y rapportent doivent être mûrement réfléchies et partagées. La règle est simple : oui à la culture de l’exemplarité, non au culte de la personnalité. Pour mimer une écologiste française, oui à une gouvernance de combat, non à une gouvernance de coups bas. Ainsi à l’heure des comptes, on décomptera moins de mécomptes. Éviter l’abus qui résulterait d’un usage excessif de l’autorité. S’affranchir du laxisme qui pourrait naître d’une trop grande mollesse des actes.

Face à l’ampleur du phénomène et à l’interpellation historique des autorités à tous les citoyens pour sauver le Mali d’aujourd’hui et construire le Mali de demain, nous proposons une nouvelle stratégie audacieuse et vigoureuse de lutte contre la mauvaise gouvernance en 40 points.

En incipit, voici deux mesures symboliques, sous forme de « quick wins » (victoires rapides) qui m’ont été suggérées par un aîné. Ainsi prises et appliquées par l’Exécutif, elles fixeront le cap et baliseront le chemin pour des actions plus vigoureuses et plus efficaces :

Ø la suspension de toutes les manifestations de réjouissance (y compris les cortèges bruyants et dispendieux de mariage) et de tous les spectacles de distraction, sur tout le territoire national, pour sensibiliser davantage la population à la gravité de la crise et à rester vigilante et mobilisée ;

Ø la suspension effective de toutes les visites à l'extérieur du Président de la République, comme il l’a d’ailleurs récemment promis, pour se consacrer exclusivement à la situation intérieure du pays. 

I- Lutte contre la corruption : Opération « poches cousues »


Il s’agit de mesures nécessaires voire indispensables qui seront douloureuses pour certaines, onéreuses pour d’autres, mais sacrificielles pour toutes afin de ramener, définitivement, la gouvernance dans le cercle vertueux. Il faut un nouveau dispositif institutionnel qui va créer un choc de gouvernance.

§  Le credo : « La rupture totale avec l’impunité et la récompense de la probité morale. »

§  Le slogan : « Un Patriote ne corrompt pas et ne se laisse pas corrompre. »

L’objectif est de réduire la corruption, en la ramenant à un niveau tel qu’elle ne puisse plus être un frein au développement économique et social du Mali. Il s’agit, clairement, de faire de la lutte contre la corruption une grande cause nationale.

1)     Constitutionnaliser la lutte contre la corruption pour marquer la volonté souveraine du Peuple malien à combattre le fléau de la délinquance économique et financière, et à s’engager dans la voie de la bonne gouvernance. La déclaration publique des patrimoines et des intérêts de tous les principaux dirigeants du pays (Présidents des différentes institutions, Ministres, Députés, Maires, Directeurs nationaux et généraux des services et des projets publics) doit être obligatoire avant toute entrée en fonction avec une mise à jour annuelle en cours de mandat ou de mission. La vérification est faite par la Cour des comptes, ou tout organe en tenant lieu. À la fin du mandat ou de la mission, un quitus est délivré par l’organe chargé de vérification. Les investigations sur la variation du patrimoine à la hausse entre le début et la fin du mandat doivent permettre de détecter tout enrichissement illicite. Toutes ces déclarations sont rendues publiques avec une diffusion large auprès des organes de presse publique et privée. La règle c’est la transparence et l’exemplarité. 
2)     Engagement politique ferme : Les plus hautes autorités du Mali doivent donner un signal fort en direction du peuple. Le Président de la République doit s’inviter une fois par an au Parlement, en séance publique au cours de laquelle il doit prononcer devant les élus du peuple une déclaration solennelle renouvelant son engagement ferme et irréversible et celui de son gouvernement à lutter contre la corruption et à promouvoir la bonne gouvernance. 
3)     Instaurer un Code de conduite : Rendre inéligibles les élus, faire démissionner les ministres, et radier de la fonction publique tout fonctionnaire ou assimilé, en cas d’infractions graves de corruption, attestées par une décision de condamnation définitive des cours et tribunaux du Mali. Suspension de fonction de tout ministre ou de tout haut fonctionnaire présumé coupable d’atteinte aux biens publics en attendant l’aboutissement de la procédure judiciaire. Aussi, interdiction doit être faite de nommer ou d’élire toute personne reconnue coupable par les juridictions compétentes d’atteinte aux biens publics. L’objectif recherché est l’intégrité et la rectitude morale des gouvernants, à travers l’instauration d’une culture de transparence, d’imputabilité et de redevabilité. Cela s'appelle de l'exemplarité et de la responsabilité : servir, et non se servir, encore moins asservir. 

4)     Améliorer le pouvoir d’achat des fonctionnaires : Selon un adage populaire, « s’il est bon de prouver qu’on est rentré dans la case mais qu’on a rien pris ; il est mieux de n’y pas rentrer ». Tous les professionnels du contrôle savent qu’une fraude est d’abord et avant tout un échec du système de contrôle interne. Autant, il est important d’appréhender les agents qui s’offrent des libertés avec les procédures ; autant, il est plus indiqué de veiller à ce que les procédures ne leur laissent cette liberté d’action ». Autrement dit, il est important d’améliorer le pouvoir d’achat des agents de la fonction publique. Cela peut se faire de plusieurs manières, notamment en actionnant deux axes non exclusifs, l’augmentation substantielle des salaires en fonction des moyens réels du pays et la baisse des prix des produits de première nécessité. Par ailleurs, l’État devrait convenir avec les partenaires sociaux d’un moratoire de 5 ans sur les grèves et autres mouvements de protestation. Il y va de l’apaisement sur le front social, condition nécessaire pour la bonne mise en œuvre des politiques publiques.

5)     Rationaliser et optimiser les structures de contrôle : La dissolution de la CASCA (Cellule d’Appui aux Structures de Contrôle de l’Administration), du Contrôle général des services publics et des inspections des ministères en transférant leurs moyens humains, matériels et financiers en une entité unique de coordination et de supervision. L’objectif est un gain de cohérence et d’efficacité. 

6)     Création d’un Parquet financier qui coordonnera les activités des différents « Pôles économiques et financiers » installés dans certains tribunaux de première instance. Ce parquet connaîtra tous les crimes de nature économique et financière. Il sera doté de tous les moyens humains, matériels et financiers nécessaires. Ce parquet comprendra outre des magistrats, une brigade financière composée d'officiers de police judiciaire et d’agents spécialisés dans les enquêtes économiques et financières (agents de banque, du fisc, etc.). Des moyens d’investigation hors du Mali doivent être également prévus afin de permettre l’accès aux comptes bancaires à l’étranger des contrevenants à la législation sur la détention des comptes à l’étranger et les infractions d’atteinte aux biens publics de résidents maliens et de personnes étrangères (entraide administrative).

7)     Renforcer l’ancrage institutionnel du Bureau du Vérificateur Général (BVG) en mettant plus d’emphase sur la prévention de la fraude (missions d’assistance, formation), l’évaluation des politiques publiques à travers les vérifications de performance, poursuivre et intensifier les vérifications financières et de conformité… Du point de vue organisationnel, créer deux pôles au sein du BVG, l’un axé sur le « contrôle sur pièces » et l’autre sur le « contrôle sur place » de façon à élargir le périmètre d’actions, à optimiser les ressources, à professionnaliser les collaborateurs, à assurer un suivi régulier des recommandations et des structures sensibles. 

8)     Élaborer un Programme national de prévention et de lutte contre la fraude pour fédérer l’ensemble des plans d’action des structures de contrôle publiques avec à la clé la mutualisation des moyens, la synergie d’actions, l’élargissement du périmètre de contrôle et l’harmonisation des méthodes. 

9)     Créer la Cour des comptes: Le périmètre d’actions de la Section des comptes de la Cour suprême (ou de la future Cour des comptes) doit couvrir toutes les institutions de la République qui doivent faire l’objet d’un contrôle régulier, au moins une fois par an. Pour ce faire, il est urgent de la doter de compétences humaines et d’outils nécessaires à l’exercice de cette mission. Les rapports de la Cour des comptes sont rendus publics. Il faut veiller à bien délimiter les prérogatives du BVG et de la Cour des comptes pour éviter les superpositions et les éventuels conflits d'attributions. Cette précaution évitera que les deux institutions se « marchent sur les pieds », surtout pour ce qui concerne l’évaluation des politiques publiques et le contrôle a posteriori des dépenses des institutions de la République (Présidence, Primature, Assemblée Nationale, ministères, etc.), des entreprises publiques et autres agences de l’État. Aussi, le Président de la Cour des comptes et le Président de la Commission des Finances, doivent être issus de l’opposition. Ces pratiques qui ont cours dans d’autres pays (comme la France) contribuent au renforcement de la gouvernance.

10) Instituer un « monsieur anti-corruption » avec le titre de « Haut Fonctionnaire de la Bonne Gouvernance » au sein des institutions de la République, des départements ministériels, et des grandes structures publiques (démembrements de l’État, entreprises et projets publics). Il devra s’assurer de l’application effective des règles de gouvernance et que les manquements soient sanctionnés. Il servira de rempart contre les violations, les défaillances, les abus et les déviances en matière de gouvernance.

11)  Assurer le suivi des recommandations des États généraux sur la corruption et la délinquance financière au Mali (tenus du 25 au 28 novembre 2008) : créer une cellule au sein de l’OCLEI (Office Central de Lutte contre l’Enrichissement Illicite) pour en assurer le suivi et l’évaluation des mesures. Les résultats de ce suivi font l’objet de publication par l’OCLEI. 

12) Créer l’Institut National de l’Audit et du Contrôle Interne (INACI) pour l’ensemble du corps des contrôleurs du secteur public et du privé. Cette structure de formation sera administrée par le BVG et comprendra au sein de son comité de gestion d’autres partenaires comme la Société Civile et l’OCLEI. 

13) Renforcer les moyens de la Société Civile (syndicats, associations, leaders religieux et traditionnels, les aînés, les médias, etc.) dans le cadre de campagnes de sensibilisation pour le changement des mentalités afin de ne pas considérer le fruit de la corruption comme du « pain béni », mais comme une atteinte grave au bien-être de toute la communauté nationale. Les associations anti-corruption doivent user de leur droit d’agir en justice contre les corrompus et les corrupteurs.

14) Professionnaliser le personnel des Directions des Finances et du Matériel (DFM) : Les directeurs des DFM devraient être remplacés, au besoin, par des professionnels sélectionnés, suivant un processus d’appel à candidatures, par un organisme privé, reconnu pour son indépendance et ses compétences. 

15) Encadrer le temps de présence à certains postes sensibles : Il s’agit de fixer une durée de présence maximum pour certains postes publics (administration centrale, services de l’assiette, banques publiques, projets). Le but est d’éviter une forme de sédentarité qui pourrait créer des accoutumances nuisibles à l’efficacité et à la transparence.

16) Contrôle physique des agents de la fonction publique : Mettre en place dans toutes les administrations, entreprises et projets publics, un système de contrôle par badge électronique (à l’entrée et à la sortie) couplé à la vidéosurveillance. L’entrée de chaque structure doit être unique et sécurisée. Tout le personnel devrait être assujetti à ce dispositif, à commencer par les premiers responsables qui doivent montrer le « bon exemple ». L’objectif est d’offrir aux citoyens une administration publique disponible, accueillante, performante et transparente. 

17) Mettre en place le Système d’Alerte de la Corruption (SAC) : Il s’agit d’un dispositif national de veille qui sera encadré par une loi spécifique intégrant transparence, efficacité et protection. Il s’agit de renforcer la protection des lanceurs d’alerte, en transformant chaque citoyen en « guetteur ». L’alerte doit être perçue comme un geste citoyen et patriotique, très loin des règlements de compte personnels ou politiques. Les éventuels dérapages qui pourraient en découler seront aussi encadrés. Un numéro vert et un site web seront dédiés au SAC. Les lanceurs d’alerte doivent bénéficier de la protection et, au besoin, de l’assistance financière de l’État.

18) Sécuriser et renforcer le recouvrement des fonds publics détournés : Un compte bancaire dédié sera ouvert pour centraliser et loger toutes les sommes recouvrées dans les opérations de lutte contre la corruption par la structure ad hoc, ou par la Justice ou par toute autre structure habilitée. Pour les recouvrements en nature (immeubles et meubles), des ventes aux enchères transparentes seront organisées. Les fonds ainsi recouvrés serviront à financer des programmes socio-économiques bien identifiés avec un impact visible pour l’ensemble de la population. Au fronton de chaque infrastructure financée, il sera inscrit pour servir d’exemple et de repère : « Offert par le peuple malien au peuple malien ». Un rapport trimestriel faisant état de toutes ces activités sera établi et mis en ligne sur le site de l’OCLEI.

19) Reformer l’appareil judiciaire : Pour beaucoup de Maliens, la justice est le ventre mou de la lutte contre la délinquance financière et la corruption. Les attentes des populations en général et des justiciables en particulier sont grandes et légitimes. Il urge pour les différents d’acteurs d’œuvrer, ensemble, à assurer une distribution saine de la justice. Il y va d’un climat social apaisé, gage indispensable du développement économique du pays. Point de progrès sans justice ! La Justice ne doit pas être un frein à la lutte contre la corruption. Elle doit pleinement jouer son rôle en tant qu’acteur essentiel de la lutte contre la délinquance économique et financière. Dans ce sens, plusieurs mesures peuvent être prises. Par exemple, pour sacraliser la séparation des fonctions (entre l’exécutif et le judiciaire), ni le Président de la République ni le Ministre de la Justice ne doivent être membres du Conseil Supérieur de la Magistrature. Il faut aussi créer un corps d’inspecteurs des services judiciaires, indépendants des autres structures de l’appareil judiciaire, motivés, à la compétence et à la probité morale avérées. Ils devront siéger au Conseil Supérieur de la Magistrature, en qualité d’observateurs, pour défendre leurs rapports d’inspection, s’agissant de la nomination et de la gestion des carrières du personnel judiciaire. L’Inspecteur Général des services judiciaires et son Adjoint devront être des membres permanents du Conseil Supérieur de la Magistrature. Par ailleurs, la réforme de l’appareil judiciaire devrait aussi concerner le délai de traitement des dossiers déférés devant la Justice. Pour le Vérificateur Général : « Quand des procédures judiciaires traînent 10 à 15 ans voire 20 ans, elles perdent leur pertinence, leur vitalité. Elles deviennent dans le jargon judiciaire des questions mortes auxquelles on ne peut apporter que des réponses mortes. »

20)                       Sensibiliser sur les fléaux de la corruption : Certains jeunes leaders musulmans, au style direct et au ton corrosif, s’investissent depuis quelques années à l’avènement d’une société malienne plus juste et équitable. Ils dénoncent avec vigueur la corruption, l’incivisme et la dépravation des mœurs. Ainsi, au moins une fois par semaine, lors du sermon du vendredi, et lors de l’homélie du dimanche, les leaders religieux musulmans et chrétiens doivent sensibiliser leurs fidèles sur les fléaux de la corruption. Les thèmes doivent être discutés et arrêtés par un collège mix composé des représentants des différents cultes, en relation avec le Ministère en charge des affaires religieuses. L’objectif est de permettre au croyant où qu’il se rend pour accomplir son devoir religieux, à la mosquée ou à l’église, d’être interpellé par l’imam ou le prêtre sur le même thème de la lutte contre la corruption. 

21) Recourir aux médias et aux autorités traditionnelles pour diffuser les messages anti-corruption.

22)                       Créer un pin’s national (avec l’écriteau « Non à la corruption ») à faire porter, librement et volontairement, par tout citoyen engagé dans la lutte contre la corruption et pour la promotion de la bonne gouvernance. 

  

II- Renforcer la citoyenneté et le patriotisme : « Le Mali avant tout ! »


L’objectif est de faire émerger le Malien nouveau, en mettant l’accent sur le civisme et l’esprit patriotique. Un nouveau type de citoyen qui a une conscience élevée de ses devoirs envers la nation et la cité et qui assume ses responsabilités avant de réclamer ses droits. Au nom de la fameuse déclaration de John Fitzgerald Kennedy : « Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays. » La Constitution malienne s’est chargée de fixer les points d’attention. En effet, les articles 22 et suivants[1] de la loi fondamentale constitutionnalisent le patriotisme et le civisme comme des devoirs incombant à tout citoyen malien. En définitive, il s’agit d’encourager les populations à adopter les valeurs positives favorables à l’émergence, comme le travail bien fait, l’intégrité, la rigueur, le civisme, le patriotisme, la discipline, l’esprit de créativité et d’équipe.

23)                       Veiller à la montée des couleurs : Avant la tenue de chaque Conseil des Ministres, nous proposons qu’il soit procédé à la montée des couleurs, devant le Président de la République, en présence du Premier ministre et de l’ensemble des membres siégeant en Conseil des ministres. Cette initiative rappellera aux gouvernants que lorsqu’ils délibéreront dans le secret de leur conscience et dans la collégialité, qu’ils ne pensent qu’à une seule chose : le Mali. De même, procéder à la montée des couleurs nationales dans tous les ministères, le lundi matin, avant le début de la semaine du travail. Cette mesure devrait aussi être étendue à l’Assemblée Nationale notamment au début et à la fin de chaque session parlementaire. Elle vise deux objectifs. Le premier, c’est de rappeler aux députés qu’une fois élus ils ne sont plus représentants de leur parti politique ou de leur seule circonscription mais qu’ils sont bien des élus de la nation entière. Le second objectif est de sensibiliser l’Assemblée Nationale qu’elle constitue le creuset de la nation et porte la voix du peuple malien. Par conséquent, les lois sont votées au nom de ce peuple et à son bénéfice, et non à ceux d’un parti, fût-il majoritaire, ou d’une personne, fût-elle première institution de la République. Par ailleurs, il faut une large diffusion de l’Hymne National sur tout le territoire et dans toutes les langues nationales du Mali. Que chaque serviteur de l’État ou élu de la Nation puisse se rappeler, au quotidien, de cette préconisation de bon sens de Victor Hugo : « Est-ce que vous ne voyez pas que vous êtes dans une balance et qu’il y a dans un plateau, votre puissance et dans l’autre, votre responsabilité ? Dieu vous pèse. Oh ! ne riez pas. Méditez. Cette oscillation de la balance de Dieu, c'est le tremblement de la conscience. Vous n'êtes pas méchants. Vous êtes des hommes comme les autres, ni meilleurs, ni pires. Vous vous croyez des dieux, soyez malades demain, et regardez frissonner dans la fièvre votre divinité. »

24)   Sacraliser l’école de la République : Déclarer solennellement l’école malienne « École de la République ». Veiller à la montée des couleurs avec l’hymne national dans toutes les écoles (publiques et privées) le matin avant le début des cours

25)    Afficher les Symboles de la République : drapeau et devise, sur le fronton de chaque école, privée et publique, primaire et supérieure. Chaque élève, chaque étudiant sera accueilli à « l’école de la République » par les symboles de l’État, piliers de la République, et référents d’appartenance et du vivre ensemble. Mettre dans le hall d’accueil de tous les édifices publics, bien en évidence, le texte de la Constitution.

26)   Enseigner l’éducation civique et patriotique (ECP) dans les programmes d’enseignement de tous les élèves de l’École Fondamentale (publique et privée) en veillant, à instaurer la culture du respect du bien public et de l’intérêt général, du refus de la facilité, du respect des lois et des institutions. L’objectif est le réarmement moral de la jeunesse malienne. Il s’agit, entre autres, de promouvoir les valeurs cardinales que sont le travail, l’honnêteté et l’intégrité qui sont partie intégrante de la culture malienne ; d’inculquer aux jeunes apprenants, entre autres, les valeurs morales et sociales comme la politesse, la courtoisie, la discipline, le respect de l'autorité et du bien commun en tout lieu, dans la rue, l'école, le jardin, le marché, le stade, l'espace public, le bus, l'hôpital, le restaurant, à respecter les feux de signalisation, les aînés, les personne âgées, les femmes enceintes et les handicapés, le refus du tapage nocturne et de l'occupation anarchique de la voie publique, à ne traverser la voie que sur le passage piéton s’il y en a, à céder sa place à une personne âgée dans un véhicule de transport en commun et en tout lieu, à ne jeter les papiers, sachets et restes de nourriture que dans les poubelles, ne pas uriner dans la rue et cracher à tout va, donner son sang pour sauver des vies, à ne pas insulter, à respecter la queue dans les administrations, à l’aéroport, à la pharmacie, à la banque et chez le boutiquier du coin. Cet enseignement se fera par « dose homéopathique » durant les neuf années du cycle fondamental. Sanctionner le cursus scolaire par un Certificat du civisme à la fin du premier cycle de l’école fondamentale.

27)      L’initiative « La Patrie Reconnaissante » : Engager la réflexion pour créer au sein des ordres nationaux la médaille du civisme et du patriotisme (avec différentes déclinaisons) pour honorer tout citoyen qui aurait fait preuve de bravoure et d’engagement dans la défense de la patrie et de la cité. Inviter, les impétrants ou leurs représentants, le « 22 septembre », fête de l’indépendance, au Palais Présidentiel avec montée des couleurs et revue de troupes. Le Chef de l’État offrira une médaille avec un certificat « La Patrie Reconnaissante » à tous les heureux élus, pour lesquels l’État à travers la HAGOPAC pourrait octroyer une rente viagère. Instaurer des promotions et des distinctions pour les personnes (physiques ou morales) qui se seraient distinguées dans la lutte contre la corruption et/ou de la promotion de la bonne gouvernance. La remise de ces prix se fera le 9 décembre, de chaque année, à l’occasion de la Journée internationale de la lutte contre la corruption.  

28)       Organiser des cérémonies du Souvenir périodiques (au moins une fois par an) sur toute l’étendue du territoire national, pour rappeler à la conscience des uns et des autres, et surtout de la jeunesse, le sacrifice consenti par les héros de l’indépendance et par d’autres patriotes pour le prestige et le rayonnement du Mali. Ce seront des occasions pour promouvoir et diffuser les valeurs du civisme et du patriotisme, en utilisant des vecteurs comme les médias, les leaders religieux et d’opinion. L’objectif est de véhiculer les repères et les valeurs de la République.

29)   Créer la Haute Autorité chargée de la Bonne Gouvernance et de la Participation Citoyenne (HAGOPAC) : Elle pourrait se faire par loi organique ou lors d’une révision de la constitution. Les missions qui seront dévolues à la HAGOPAC sont de veiller au respect des symboles de l’État et promouvoir la bonne gouvernance. Elle coordonnera les activités du Mouvement National des Pionniers (MNP), du Service National des Jeunes (SNJ), du Centre National de Promotion du Volontariat (CNPV) et de toute autre structure agissant dans le périmètre d’actions de la HAGOPAC. Celle-ci sera représentée par un « Haut fonctionnaire » dans les institutions de la République, les départements ministériels, et les grandes structures publiques (démembrements de l’État, entreprises et projets publics). Dans ses attributions relatives à la promotion de la bonne gouvernance, ce Haut fonctionnaire est aussi appelé « monsieur anti-corruption ». À ce sujet, la Haute Autorité chargée de la Bonne Gouvernance et de la Participation Citoyenne (HAGOPAC) travaillera en étroite synergie l’OCLEI.

30)    Démocratiser l’accès universel au Centre National de Promotion du Volontariat (CNPV) : supprimer dans les conditions d’accès le critère « avoir une qualification académique ou une aptitude professionnelle ». Tout citoyen malien, par amour pour son pays, qui désire s’y engager et faire une action utile pour son pays ou sa cité doit être éligible au CNPV.

31) Organiser une cérémonie « Hommage national » à tout enfant du pays ou d’ailleurs qui tombera sur le champ de l’honneur en se sacrifiant pour la cause nationale. L’oraison funèbre devrait être présidée par le Chef de l’État ou toute autorité politique reconnue.

32) Créer un service civique volontaire (SCV) : le Service civique donne l'opportunité, à tout citoyen, de s'engager pour une cause à laquelle il tient et pour laquelle il souhaite se rendre utile. Il s'agit d'une activité à temps plein ou à temps partiel (par exemple le week-end, ou les jours fériés, ou pendant les congés ou après les heures normales de service). L’action citoyenne peut se faire au bénéfice d’une association de bienfaisance ou de la collectivité locale dans des domaines aussi variés que l’éducation (cours de soutien aux élèves en difficulté sécuritaire, intellectuelle, physique ou mentale), la santé ou le caritatif. Il s’agit de mettre en exergue l’engagement social du bénévole et en faire un exemple à suivre dans la communauté, de susciter des vocations et de vulgariser ainsi la culture du civisme et de la solidarité. La gestion du SCV sera confiée au CNPV dont les statuts pourraient être aménagés à cet effet.

33)      Créer le Fonds National du Civisme : Ce fonds sera alimenté par les revenus générés par la suppression de 2 jours fériés dans l’année. Les citoyens travailleront, exceptionnellement, pour la cause nationale. Utiliser les fonds issus de cette mesure pour financer les activités de la Haute Autorité chargée de la Bonne Gouvernance et de la Participation Citoyenne (HAGOPAC).

34)   Élaborer une Charte de code civique : Aucun responsable public (mandat législatif, exécutif, administratif ou judiciaire) ne doit prendre fonction que s’il signe la Charte du code civique lors d’une cérémonie publique.

35)  Renforcer la neutralité de l’administration publique : Quand un haut fonctionnaire veut faire de la politique, il doit au préalable démissionner de sa charge publique.

36)  Interdiction du culte de la personnalité : Toute prise de position ou toute manifestation publique à l’effet de chanter les louanges d’un dirigeant politique en fonction doit être interdite et sévèrement sanctionnée. En clair, il s’agit de mettre définitivement fin sur la place publique à la « filière porteuse » de laudateurs et de courtisans qui causent en réalité un grave préjudice à la gouvernance.

37)      Poursuivre et sanctionner (avec possibilité de travaux d’intérêts communs) tout Malien dont la prise de parole ou l’action est hostile à l’image et à la réputation du Mali ;

38)     Poursuivre et sanctionner pénalement, avec une forte amende, toute personne à l’origine ou à la diffusion de publicité mensongère quelque soit le support utilisé (TV, radio, réseaux sociaux, réunions et regroupements publics), tendant à vendre des faux médicaments ou à promouvoir des produits dits « magiques » (encens, pommades, stylos, etc) ;

39)  Dissoudre toutes les milices armées du pays et les inscrire sur les listes nationale et internationales des organisations terroristes. Engager un recrutement massif dans l’armée nationale pour enrôler tous les démobilisés des milices. Suspendre toutes les associations dites de défense et de promotion culturelle des zones de conflit ;

40)       Lancer une contribution nationale pour sauver et reconstruire le Mali. La gestion des fonds doit être confiée à un comité présidé par la société civile et composée des représentants des principales forces vives de la nation (majorité, opposition, presse, leaders coutumiers et religieux, représentants des forces de défense et de sécurité).  





Conclusion

Le Mali a besoin de tous ses enfants. Et, ceux-ci ont besoin de leur pays. N’oublions jamais cet adage du terroir : « La force du poisson est dans l’eau. » Se dépouiller de tout ce qui est accessoire pour se consacrer à l’essentiel : le MALI. Faisons fortune dans l’amour de ce beau pays qui nous a tant donné, avec même le privilège et l’honneur d’être des Maliens. Mais à qui nous avons tout refusé. Soyons des citoyens engagés et endurants, pour élever ce vaillant pays dans le concert des nations et dont la voix était entendue et attendue. Soyons un seul peuple poursuivant un seul but avec la seule foi de mériter de la nation. 
Le chemin sera long, sinueux voire souvent ombrageux. Il sera savane, plaine, désert, rocailleux et pluvieux. Et au bout, il y a l’espoir, la lumière, le fruit de la persévérance, de l’exemplarité et du travail bien fait. 
Pour ce faire, autorisons-nous à paraphraser la philosophe et femme politique française Simone Weil : il faut donner aux Maliens quelque chose à aimer, le Mali.




Cheickna Bounajim Cissé, l’émergentier.

Email : cbcisse@yahoo.fr 

Économiste, essayiste et cadre dirigeant de banque, il est le Président de la Commission « Banques & Compétitivité » du CAVIE (Centre Africain de Veille et d’Intelligence Économique).
Titulaire d’un MBA de l’Université de Paris Dauphine et de l’IAE de Paris, il est détenteur d’un Master professionnel en Sciences Politiques et sociales – option Journalisme de l’Institut Français de Presse (IFP/Université Panthéon-Assas), possède une Maîtrise en gestion des entreprises de l’ENA de Bamako et est diplômé d’études supérieures en Banque (ITB/CNAM de Paris). Il est l’auteur de l’acronyme MANGANESE, désignant neuf pays africains émergents ou en voie de l’être. Il se définit comme un « émergentier », un activiste de l’émergence de l’Afrique.
Il est contributeur pour plusieurs médias et auteur de plusieurs publications, dont « Les défis du Mali nouveau » (Amazon, 2013, 269 pages) ; « Construire l’émergence, un pacte pour l’avenir » (BoD, 2016, 736 pages) ; et « FCFA : Face Cachée de la Finance Africaine » (BoD, 2019, 452 pages).





[1]Constitution du 25 février 1992, Article 22 : « La défense de la patrie est un devoir pour tout citoyen. » Article 23 : « Tout citoyen doit œuvrer pour le bien commun. Il doit remplir toutes ses obligations civiques et notamment s'acquitter de ses contributions fiscales. »  Article 24 : « Tout citoyen, toute personne habitant le territoire malien a le devoir de respecter en toutes circonstances la Constitution. »