Les Maliens sont-ils donc conscients
de la réalité du retard économique de leur pays ? Pas si sûr. Il n’y a pas
de miracle en économie. Pour créer plus de richesse, on peut améliorer la
productivité, mais la courte échelle est de produire plus, et donc de travailler
plus.
Si cette formule est admise, comment comprendre que le Mali puisse
s’offrir le « luxe » d’au moins 12 jours fériés l’an, alors que dans
certains pays dits industrialisés, à des années-lumière du statut économique du
Mali, le nombre soit nettement moins élevé : Etats-Unis, Canada, Chine (10
jours) ; France (11 jours) ; Allemagne (9 jours). Pire, le goût de
certains Maliens pour les jours chômés est tellement prononcé qu’ils ont
inventé le « pont », c’est-à-dire la veille ou le lendemain d’une
fête lorsque celle-ci tombe un mardi ou un jeudi. Et gare au jour ouvrable qui s’intercalerait
entre deux jours fériés ! Le « bridge » est tout de suite
construit. Et pour une fois, on s’accroche aux nouvelles de la télévision
publique. Et quand le Gouvernement ne déclare pas le « pont »,
« journée chômée et payée », ou tarde à le faire, certains
fonctionnaires font « l’école buissonnière », désertant tout
simplement leur poste de travail, en laissant les usagers du service public à
l’errance.
C’est une réalité, au Mali, on
s’improvise de longs week-ends. L’actuel Premier ministre Modibo Keïta en a fait
l’amère expérience. Le vendredi 25 septembre 2015, lendemain de la fête de la
Tabaski, il a effectué des visites impromptues au niveau de la Cité
administrative (temple de l’administration publique malienne), pour constater
l’absence de certains ministres et de plusieurs hauts-fonctionnaires de l’Etat.
Et le constat n’est pas simplement au
niveau de la fonction publique. Il est aussi patent dans les lieux de
formation. Chez les étudiants, tous munis à l’occasion d’une « montre
suisse », la règle des « 15 minutes », voire même moins, prévaut
depuis des décennies : « Si dans 15 min, le prof n’est pas là,
je me casse ! » Même,
certains jeunes élèves – l’avenir de la nation – se frottent les mains d’avoir
moins d’heures à étudier ; et jubilent dès que leurs parents, heureux eux
aussi, leur annoncent la bonne nouvelle : un nouveau jour férié de
plus !
Pourtant, tout le monde veut que le Mali se développe et soit
à l’image des grandes nations du monde. C’est une quête légitime, mais il va
falloir travailler plus et mieux pour accéder à un tel statut.
(*) - Extraits de l'ouvrage de Cheickna Bounajim Cissé, Construire l’émergence, Un pari pour l’avenir :
12 axes d’action, 100 propositions pour booster le financement de
l’économie, Editions BoD, septembre 2016, 736 pages.
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